Mercredi 30 août
Nous sommes rebelles et insoumis. Partout la lutte. Dans tous les musées que nous avons visités, quand il y avait une notice "do not touch" nous avons touché. à l'hôtel, pour nous venger de l'absence de marmelade au petit déjeuner, à la question "combien de petits déjeuners avez vous pris?", j'ai répondu trois alors que nous en avions pris quatre.
L'insoumission n'est pas une politique, c'est un état d'esprit. J'ai toujours été surpris par l'utopie créatrice des militants de Lutte ouvrière. Les mains nues, sans argent sans armée, ils allaient renverser le système capitaliste et instaurer un régime communiste sans exploitation de l'homme par l'homme. Et maintenant, Mélenchon et la France insoumise, sur la trace de Marchais, 17 députés, refus de principe de s'allier (nous n'entrons pas dans les magouilles), le peuple va lutter, il va lutter contre les vaccins avec Ruffin, contre le voile ou pour le voile, je ne sais plus bien. L'essentiel est de lutter.
Quand je vois une notice "do not touch" je touche. Ce n'est pas une politique, c'est un état d'esprit.
après avoir donné de mauvais exemples, voici venir l'âge des bons conseils.
mercredi 30 août 2017
mercredi 23 août 2017
act up et bizi
À l’occasion de la
sortie du film 120 battements sur Act
Up, un ancien président, Didier Lestrade, compare les modes d’action d’Act Up
et celle de Bizi, au Pays Basque. Bizi s’est fait connaître en volant des
fauteuils dans des agences bancaires pour protester contre les fonds
spéculatifs.
J’aimerais
préciser certains points sur cette comparaison qui me semble infondée. Bizi apporte
un soutien régulier aux revendications des prisonniers basques emprisonnés pour
activités terroristes, refusant de demander pardon et de s’engager à ne plus
recourir à la violence armée. Je n’ai pas souvenir d’Act Up menant des actions
de soutien à Action Directe ou Fraction Armée Rouge. Bien plus, je n’ai aucun
souvenir qu’Act Up, qui intervenait sur la prévention du Sida en prison, eût
demandé des préventions spécifiques pour les prisonniers basques ou d’autres
terroristes emprisonnés. Une telle discrimination eût été considérée comme la
honte suprême.
guerre civile
Les sociétés dites totalitaires sont des sociétés en
guerre. Dans le roman d’Orwell, 1984 se
mène en permanence une guerre contre l’étranger et contre les ennemis de l’intérieur.
Kim Jong-Un le dictateur de la Corée du Nord se maintient au pouvoir comme chef
de guerre. Regardez-le, je ne le connais pas, mais qui imaginerait Kim Jong-Un
dérouler des arguments dans une réunion électorale, affronter un adversaire
dans un débat télévisé ? Si son pays n’était pas en guerre, réelle ou
jouée, il ne tiendrait pas cinq minutes au pouvoir. Peut-être encore moins. À
la guerre, des millions de gens sans avenir peuvent obtenir des galons, des
récompenses, des voitures de fonction, des appartements confisqués. Remplacer
des ingénieurs et des directeurs d’usine. Dans une société de guerre civile, un
fusil remplace les diplômes, les compétences. Une lettre de dénonciation permet
d’obtenir un logement, un poste. Une action d’éclat vous réserve une place au
paradis.
Le terrorisme vise à construire une
société totalitaire sans passer par une révolution. Il transforme un territoire
paisible en camp retranché. Les tribunaux de paix deviennent des cours martiales.
Les grandes questions politiques sont guerrières : que fait-on des prisonniers
arrêtés, libérés, amnistiés, glorifiés ou vilipendés ? Où voit-on se
précipiter des milliers d’hommes et de femmes, derrière des élus, en un
gigantesque jeu de pistes pour trouver des caches d’armes et ensuite les
déterrer ? Dans des sociétés marquées par le terrorisme. Faut-il amnistier
ou prolonger la détention ? Faut-il construire des monuments aux soldats
tombés ou à leurs victimes ? Faut-il commémorer ou oublier ?
Dans une société tétanisée par la peur,
les gens se partagent en patriotes et en traîtres. Tout le monde a peur, d’être
arrêté, d’être dénoncé, d’être abattu. Des combattants qui ont quitté le combat
mercredi sont la cible de ceux qui le quitteront vendredi. Faut-il un procès ou
faut-il oublier la terreur ? Longtemps après le silence des armes, les
gens continuent d’avoir peur. Peur de dénoncer des héros qui se sont sacrifiés.
Peur de n’avoir rien dit, d’avoir détourné les yeux. Surtout que le silence
règne. Il faut déterrer les armes mais pas les charniers.
Sous nos yeux, la vie politique se
partage en deux immenses options. Entre ceux qui considèrent que les
adversaires doivent être éliminés pour qu’émerge une solution, et ceux qui
considèrent que les adversaires font partie de la solution. Pour les etarras et
les nationalistes corses, la réponse était au bout du fusil. Au Venezuela,
Chavez et son successeur Maduro ont plongé leur société dans une guerre civile
larvée. Une guerre civile froide. Qui n’est pas avec nous est contre nous. Le
contraire d’une société apaisée où qui n’est pas contre nous est avec nous. Voyez
Mélenchon et ses mots d’ordre militaires « dégagez ! Place ! Nous
ne voulons plus de vous ! ». Il entasse des dictionnaires pour
construire des barricades. Tout en haut des millions de mots accumulés, il est
à l’aise parce que sur une barricade, il n’y a que deux côtés. Dans une chambre
qui s’étale en arc de cercle, il semble embarrassé car il devient compliqué de
tracer des frontières.
La
droite extrême partage la France entre des Français dignes de l’être et des
Français indignes à qui il faut ôter le droit de voter. Et les nationalistes corses
et basques aspirent à créer un statut de « résident », avatar des Français
de souche, ceux qui s’inclinent devant les monuments aux morts des terroristes
dont le sang a fertilisé des vignes amères.
Je
n’arrêterai jamais de lutter pour une société démocratique. Contre Mugabe, je
choisis Mandela. Contre Maduro, je choisis Luisa Ortega. Gorbatchev a cru
pouvoir réformer la société russe comme si c’était une société civile. Hélas, elle était encore en guerre et c’est un
ancien du KGB qui est au pouvoir. Jamais les criminels n’ont été jugés. Contre
les terroristes ou contre les demi-soldes du terrorisme, tous les jours, partout,
il faut choisir.
vendredi 18 août 2017
la révolution en chantant
Je suggère de
confiner la révolution aux activités artistiques, scientifiques,
intellectuelles et de conserver la réforme pour le monde réel. Ken Loach est
bien connu pour son cinéma révolutionnaire. Il n’est même connu comme
révolutionnaire que dans le cinéma. Il mène une activité artistique bien
remplie et peut obtenir d’une industrie dominée par la finance internationale
des récompenses prestigieuses. François Ruffin réalise d’excellents films avec
du personnel précaire, Comme Michael Moore, autre révolutionnaire des images,
on le distingue dans cette citadelle de la révolution qu’est le Palais du
Festival de Cannes. Continuons dans cette voie. Pendons au théâtre et au cinéma
et dans la chanson le dernier capitaliste avec les tripes des socio-traîtres.
Tirons sur la police en chansons, nationalisons l’énergie en bandes dessinées,
supprimons dans les romans l’exploitation dans les usines. Mais s’il vous plaît,
ne confondez pas les genres. François Ruffin à l’assemblée nationale, quel
gaspillage de talent ! Devenu sur les bancs de velours un pitre inaudible
alors qu’il est si efficace derrière une caméra.
échos
Rappel
Les
attentats de Barcelone en Espagne ont remis en mémoire les attentats
djihadistes à Madrid du 11 mars 2004. 190 morts dans les transports
publics. Le gouvernement PP de l’époque se précipita d’abord pour attribuer les
attentats à l’ETA et cette « erreur » lui coûta la défaite aux
élections qui suivirent.
Mais
cet attentat marqua le début d’une réflexion au sein de l’ETA qui se termina en
2011, sept ans plus tard, par le cessez-le-feu définitif. L’organisation fut assommée
par le fait que la majorité des Espagnols furent un temps convaincue qu’il
s’agissait bien de l’ETA. Même des soutiens de l’organisation s’y laissèrent
prendre et commencèrent à condamner. Si des sommets de monstruosité pouvaient être
pris pour des actions de l’ETA, il fallait vraiment commencer réfléchir à d’autres moyens. Il fallut sept ans pour y
parvenir.
Quand
j’utilise les mots « djihadistes basques » pour « etarras »,
on me reproche la provocation. Il n’est pas inutile de rappeler qu’en mars
2004, la confusion entre les deux terrorismes était bien réelle et qu’elle affectait
aussi bien les adversaires de l’ETA que ses amis les plus proches.
Sept
ans pour cessez-le-feu. Encore sept ans pour désarmer. Faudra-t-il attendre
encore sept ans pour la dissolution ? L’ETA attribue la lenteur de ces
décisions au gouvernement espagnol et français. Ce reproche est difficile à
comprendre. Le cessez-le-feu de 2011 fut décidé sans aucune contrepartie de la
part des gouvernements espagnol et français. Le désarmement de 2017 fut décidé
de manière autonome par l’organisation terroriste. On attend maintenant la
dissolution. Faudra-t-il attendre encore sept années ?
jeudi 17 août 2017
des victimes dans les deux camps
Dans
le Pays Basque espagnol, des procès ont lieu contre des humoristes qui se
moquent des victimes de l’ETA (Le monde :
4 février 2017). Tout le monde s’accorde à fustiger leur mauvais goût, mais certains
disent que le mauvais goût ne devrait pas être puni de prison. Pour Marimar
Blanco, présidente de la fondation des victimes du terrorisme, sœur d’un élu du
PP assassiné par l’ETA en 1997, « aucun message dénigrant les victimes ne
doit rester impuni » de la même façon que les insultes aux victimes de la
Shoah sont punies par la loi.
Sur
la question des victimes se mène une bataille politique qui nous concerne aussi.
La gauche abertzale a renoncé à la terreur, mais elle défend l’amnistie pour
les etarras afin de clore un conflit qu’elle présente
comme ayant fait des victimes « dans les deux camps ». Pour le
philosophe Fernando Savater : confondre bourreaux et victimes « c’est
prolonger par les mots le travail des terroristes ».
C’est
exactement ce qu’il se passe au Pays Basque français. Les blanchisseurs de la
terreur se congratulent parce qu’ils ont eu l’audace de parler « de toutes les
victimes ». Quand les élus de tous bords, au garde-à-vous à l’appel de la
gauche abertzale, reprennent l’expression pour répondre aux accusations d’oubli
des victimes de l’ETA, ils n’en reviennent pas de leur intrépidité. Se
rendent-ils compte qu’ils confondent ainsi bourreaux et victimes, qu’ils acceptent
la thèse la gauche abertzale qui parle des « victimes dans les deux camps ».
Comme
disait Trump à propos des manifestants de Charlottesville, « il y a des victimes
et des gens biens dans les deux camps ».
Ça vous met en colère ? Au Pays
Basque français, « il y a des victimes dans les deux camps », c’est
tous les jours. Ça met moins de gens en colère.
c'était mieux avant
Non, ce n’était
pas mieux avant,
de Johan Norberg, Plon. Recension par Roger Pol Droit, le monde, 2 juin 2017.
Thèse
du livre : le monde va mieux, notre présent est mieux que le passé. Les
famines ont pratiquement disparu, la durée de vie a augmenté, la grande
pauvreté a reculé de 42% en 1981 à 10% (2013) de la population mondiale.
L’illettrisme est passé de 80% de la population mondiale à 15 % en 2017. Les
humains sont plus riches, en meilleure santé, dans des logements plus
confortables, sont plus instruits et travaillent moins. Le monde actuel est
moins violent, plus égalitaire, et moins pollué.
Pour autant, le monde n’est pas le meilleur
possible, mais l’auteur prend le contre-pied du catastrophisme ambiant, qui est
fait d’ignorance et de complaisance envers l’apocalypse. « Une révolution
a rendu notre monde plus protecteur et plus sûr…cette révolution est invisible
alors que les malheurs du monde s’affichent bruyamment ».
La
propension à se lamenter est une vieille affaire : « nous sommes
arrivés en des temps mauvais, et le monde est devenu très vieux et malfaisant.
Les hommes politiques sont corrompus, les enfants ne respectent plus leurs
parents ». C’est le texte d’une stèle chaldéenne trois mille huit cents
ans avant JC.
La
discussion ne prend pas une ride. Elle est d’abord politique. Si tout va mal,
il faut tout changer, radicalement. Rappelez-vous les discours électoraux, les
candidats décrivent une société à la dérive. Comment ceux qui les écoutent ne
vont pas directement se jeter dans la rivière la plus proche est un mystère. Extrême
droite, extrême gauche, le discours était proche.
Mais
-j’allais dire en même temps- il est vrai que mieux ça et plus scandaleux ce
qui ne va pas. Si les soins sont gratuits, ne pas y accéder est l’horreur. Il en
va ainsi pour tous ce qui est décrit par Norberg : logements, éducation. Le
monde supporte mieux un manque généralisé qu’une défaillance marginale.
mardi 15 août 2017
libération anticipée
France
2 15 août 17. Reportage sur la commission de libération anticipée, qui
conseille le Juge d’application des peines. La question qui est posée est
évidemment celle des risques de récidive, de l’insertion éventuelle. Ce qui
domine est l’attitude des prisonniers vis-à-vis de leur victime. Si l’on
constate un manque total d’empathie à l’égard des dégâts humains provoqués, la
commission émet généralement un avis négatif.
Dans
le cas des prisonniers basques emprisonnés pour activités terroristes, la question
du pardon demandé est tout aussi centrale. Demander pardon aux victimes ou à
leur famille est un élément important de leur libération anticipée.
Au
Pays Basque français, les blanchisseurs de la terreur qui souhaitent
rapprochement, libération anticipée, voire amnistie, la question du pardon, de
l’empathie à l’égard des victimes n’est jamais posée.
J’espère
que certains d’entre eux ont regardé l’émission. Sinon, ils peuvent la regarder
en replay pendant toute la semaine.
lundi 14 août 2017
un homme pressé
Un
homme pressé
Le
lehendakari du Pays Basque Nord, d’après Sud-Ouest du 14 août, demande le
rapprochement des prisonniers basques de leur famille. Il les nomme « anciens
militants ».
On
est un peu gêné de la confusion qui règne chez Jean-René Etchegaray. Sa traduction,
de l’adage « militia est vita
hominis super terrum » par « militer est le sort de l’homme sur
terre » est un contre-sens. La bonne traduction est « être soldat est
le sort de l’homme sur terre ».
Plus
grave est la confusion sur le terme de « militants ». Car les prisonniers
dont il plaide la cause ne sont pas des « militants », mais des personnes
condamnées pour activités terroristes en bande armée. En outre, ces terroristes
condamnés pour activités terroristes en bande armée peuvent obtenir, pour la
plupart, leur libération anticipée s’ils demandent pardon aux familles de leurs
victimes et s’engagent à renoncer à toute action terroriste à l’avenir.
En
d’autres termes, Jean-René Etchegaray demande le rapprochement de leurs
familles de « personnes condamnées pour activités terroristes en bande
armée qui refusent de demander pardon et de renoncer à toute activité terroriste ».
C’est
vrai que c’est plus long à dire qu’ « anciens militants ».
samedi 12 août 2017
noir sur noir
Noir
sur noir, blanc sur blanc
Sur
l’identité, je suis intarissable. Ma situation de déraciné compulsif, d’exilé
permanent, d’étranger intransigeant, me permet d’intervenir sur cette question
et à chaque fois, de recevoir en retour un soufflet en incompatibilité. Je ne
peux parler de rien puisque je ne suis de nulle part.
Le
film de Kathryn Bigelow, Detroit, sur
les émeutes de 1967, est condamné par des organisations noires parce que la réalisatrice
est blanche. Ma compétence s’allume,
clignote, mobilise mes expériences multiples. Consacrant une partie de mon
temps à l’histoire irlandaise, des gardiens du temple national m’ont demandé de
quel droit j’intervenais sur des sujets sensibles, puisque j’étais complétement
étranger. Il m’est arrivé d’intervenir aussi sur des sujets concernant les
Juifs, et en boomerang, j’ai reçu des baffes qui me punissaient d’intervenir
dans un champ qui devrait m’être interdit étant donné une judéité chancelante,
ni religieuse, ni politique, tout juste imposée par une vacance prépucière et
effleuré par une étoile fugace. Ensuite, j’ai cru pouvoir intervenir sur le
nationalisme basque et on m’a fait comprendre que de passer quelques années
dans les Pyrénées atlantiques même en résidence principale, n’efface nullement
ma qualité d’étranger disqualifié par son étrangéité.
Quand
je partage cette expérience avec des auditeurs situés à gauche de l’échiquier
politique, je suscite une certaine sympathie. Ils me donnent raison d’envahir
des territoires sensibles. L’humanité est une et indivisible et rien de ce qui
est humain ne devrait m’être étranger.
Je
vaquais donc tranquillement, le cuir tanné par les coups, mais allégés par une
doxa protectrice. Et voilà que depuis un certain temps, la protection se
fissure. Des associations noires prétendent interdire aux non-noirs de
s’occuper de leur histoire. Et je sens parfois une certaine acceptation, sinon
tendresse, pour cette interdiction, dans les rangs d’une partie de la gauche.
Je
persiste à refuser la dérive identitaire. La couleur ne change pas la donne. La réaction
des nationalismes quelle que soit la couleur de l’arc-en-ciel ne vise pas à
protéger une communauté contre les intrusions étrangères, mais d’abord à
assurer le contrôle d’une partie de la communauté sur l’ensemble. La partie la
plus « radicale » veut s’arroger le droit de nommer qui en fait
partie ou pas. Quand on me refusait le droit d’intervenir dans la situation
irlandaise, cet interdit faisait partie d’un interdit plus général sur
les Irlandais eux-mêmes. Parmi les Irlandais, il y avait les vrais et les faux,
les authentiques et les frelatés, ceux qu’on appelait les « West
Britons », les Britanniques de l’Ouest, attirés par l’ennemi héréditaire,
par sa culture. Qui avaient abandonné la religion nationale. Et les purs et
durs qui parlaient gaélique ou faisaient semblant, qui s’affirmaient prêts à
mourir pour la patrie. De même, on m’accusait depuis longtemps d’être un Juif
défraîchi, qui avait abandonné depuis longtemps l’authentique tradition, sans
religion, sans langue. Il n’est pas inconditionnel de l’État d’Israël, et même
pour Kippour il ne jeune pas. Quand à ma basquitude, je n’en ai ni les gênes,
ni la langue et je n’en ai pas partagé l’histoire. Je constate que ce rejet de
ma personne est utile pour distinguer les patriotes des faux Basques, ceux qui
acceptaient de me parler et de discuter avec moi, ou encore pire, ceux qui
trouvent quelques grains de vérité dans mes descriptions du paysage.
Pour
les indigènes de la République ou les héritiers des Black Panthers, la
mécanique est identique. Ils sont juges de la couleur de la peau. Ceux qui ne
partagent pas leurs exclusions ont perdu un peu de leur ébène. Des oncles Tom,
des esclaves mal affranchis, des traîtres à la cause, des passés à l’ennemi.
Des blanchis.
Cette
mécanique ne s’arrête jamais, elle a pour moteur son existence même. Les plus
purs des plus purs trouvent toujours des moins purs parmi les purs. Un homosexuel
ne peut pas être un vrai Irlandais, un bourgeois intégré ne peut pas être un vrai
Noir. Il se prétend basque et a critiqué l’ETA.
Malheur
aux peuples qui délèguent à une fraction du peuple le droit de décider qui
appartient au peuple et qui ne lui appartient pas.
leur dos est souple
Comparez
les contorsions de la France insoumise de Mélenchon et celles des communistes
français sur le Goulag, Pol Pot, l’invasion de la Tchécoslovaquie par l’Union
soviétique. Les mots sont les mêmes. Tout était là, prêt à être resservi, l’affleurement
d’une certaine gêne mais l’acceptation du dogme.
La
soumission à l’insupportable est un plat qui se mange froid.
qui se radicalise?
Le
succès de Jim Corbyn au Royaume-Uni serait dû à une certaine radicalisation qu’on
retrouve dans la gauche européenne. Je lis dans libération ce qui fait son succès. Louis Emmins a un double espoir :
qu’avec Corbyn, on maintienne les allocations sociales pour son mari handicapé.
Et elle espère la gratuité des études
supérieures pour son fils. Un autre électeur de Corbyn espère la
renationalisation des chemins de fer et l’interdiction des contrats de travail
à zéro heure.
En somme, les électeurs
demandent pour la Grande-Bretagne l’alignement sur les protections sociales qui
existent en France. Est-ce la social-démocratie qui se radicalise ou la gauche
radicale qui se social-démocratise, comme en Grèce ou au Portugal, où elle a
renoncé à demander la sortie de l’euro ? vendredi 11 août 2017
cérémonie de l'oubli
Dans
de nombreux pays du monde, après des grandes catastrophes, les sociétés
organisent des cérémonies du souvenir. 11 novembre, 8 mai, journée de la
déportation, Nagasaki, etc. Ces cérémonies sont importantes et l’on se rend
compte de leur importance en étudiant les sociétés où les catastrophes ne sont
pas commémorées. Pas de journée du Goulag en Russie, pas de journée de la
Grande Famine en Chine.
Comment
caractériser le Pays Basque français qui met en scène régulièrement des
cérémonies de l’oubli ? À intervalles réguliers, des blanchisseurs de la
terreur mettent en scène en accord avec les anciens bourreaux une grande
lessive qu’il faut bien appeler la cérémonie de l’oubli. À Louhossoa, à
Bayonne, en décembre prochain à Paris, seront à nouveau mises en scènes les nouvelles
cérémonies de l’oubli. Il en faudra beaucoup d’autres pour oublier les 829
victimes de l’ETA.
jeudi 10 août 2017
libération
Mikel
Irastora, en examen pour « association de malfaiteurs en relation avec une
entreprise terroriste », considéré comme l’un des derniers chefs de l’ETA,
a été libéré mardi 8 août sous contrôle judiciaire.
Ainsi
se confirme l’adage qui ne cesse de hanter les jours et les nuits des familles
des 829 victimes de l’ETA : « on sort plus facilement de prison que
du cimetière ».
mercredi 9 août 2017
mélenchon et le front
Je
voudrais répondre à plusieurs correspondants qui s’indignent que je mette sur
le même plan les insoumis et les frontistes. Premier élément de réponse :
les « insoumis » ont pris la place du PCF et dans la forme comme sur
le fond, Mélenchon est le moderne Marchais. Pour moi, ce n’est pas un
compliment. Même assurance dogmatique, même mépris des adversaires (en vrac,
les journalistes, les communistes historiques, les socialistes). Sur des points
non négligeables, l’héritage stalinien du PCF se retrouve : sympathie pour
des régimes indéfendables, refus de condamner les crimes staliniens au
parlement européen, considérer la social-démocratie comme l’ennemi principal.
Ce qui s’est exprimé à l’époque Marchais pour le « vote
révolutionnaire » pour Giscard contre Mitterrand, et à l’époque Mélenchon,
par l’abstention révolutionnaire au deuxième tour des élections présidentielles.
En
admettant ces points, la question reste : pouvait-on hier mettre sur le
même plan les communistes et les fascistes, aujourd’hui les insoumis et les
frontistes ? Pendant longtemps, qui osait simplement un début de
comparaison était mis au ban de la gauche. Puis on a osé, de plus en plus. J’ai
écrit un livre sur le sujet : « Éloge
de l’infidélité » où j’osais la comparaison.
Ce
qui est commun à tous est le refus de considérer les libertés communes comme
fondamentales. Cette communauté de vue permet de danser la valse avec des nazis
autrichiens et la salsa au-dessus des prisons cubaines.
Sujet
ancien et dépassé ? Non. Quand les chavistes mettent les opposants en
prison ou massacrent les manifestants, un certain gauche hésite à condamner. Quand
Erdogan et Poutine emprisonnent les journalistes et massacrent des
manifestants, une certaine droite hésite à les condamner.
Plus
important : entre la gauche radicale et la droite extrême se retrouve la
même haine de l’Europe qui se manifeste par un repli sur l’hexagone.
Enfin,
un élément qui n’a rien à voir avec la présente discussion : quand
Mélenchon a affronté Marine Le Pen, il a été battu. Quand Macron a affronté
Marine Le Pen, il a gagné.
lundi 7 août 2017
désenchantement
Désenchantement
Trois
mois c’est peu.
J’ai
soutenu Macron, j’ai voté pour lui, j’ai aimé la manière dont il a formé son
premier gouvernement, dont il s’est débarrassé sans barguigner des ministres
étonnés, dont il a su rassembler des compétences de gauche et de droite. Le gouvernement
a été renouvelé, l’Assemblée nationale est fraîche. Dans le domaine des relations
internationales, le président fait bouger les lignes. J’espérais dans le
domaine politique la même invention. Je l’attends toujours. Après trois mois,
je ne suis pas mécontent, je suis inquiet pour l’avenir.
Encore
une fois, la pesanteur sociologique fait émerger des élites dont la première
caractéristique est l’entre soi. Tous ces gens portent un uniforme. Pas dans
leur vêtement, mais dans leur tête. Comment n’ont-ils pas vu collectivement qu’une
ponction de cinq euros sur l’aide au logement aurait des effets désastreux ?
Personne pour sonner l’alerte ? Par quels moules sont-ils passés pour être
à ce point insensibles ?
Quand
le ministre de l’intérieur parle des migrants, il évoque les organisations humanitaires
d’un strict point de vue politique, froid, sans émotion, sans un mot pour
saluer leur travail patient, sans un mot de sympathie. Répondre aux urgences ne
ferait que rendre notre pays attractif aux gens en galère. Ne méritent-ils pas un mot chaleureux pour
leur travail ?
Sur
la loi de la moralisation, ça marche. Pour la réforme du droit du travail, les
choses avancent. Et pourtant je suis inquiet. Une machine sans âme qui ne fait
pas vibrer.
Je
voudrais leur dire à tous qu’ils s’inquiètent davantage des années qui
viennent. Leur responsabilité est énorme et c’est l’aune de cette
responsabilité qu’ils doivent travailler. Ne pensez pas petit. S’ils n’arrivent
pas à l’emporter dans les têtes et dans les cœurs, c'est à dire à faire en
permanence de la politique, il ne restera plus face dans notre pays que les impasses
radicales et les haines extrêmes, les insoumis contre les frontistes. La
politique, aujourd’hui, c’est d’abord éviter cet avenir-là.
samedi 5 août 2017
punir ou chanter?
En
Irlande, dans les campagnes éloignées, la double signalisation s’interrompait
parfois et ne restaient que les panneaux en gaélique que les touristes perdus
recherchaient en vain sur leur carte routière.
Au
Pays Basque dans les campagnes de l’intérieur, parfois de fougueux patriotes
effacent les panneaux en français pour ne laisser que les noms basques
indéchiffrables aux regards voyageurs.
Si
on barbouillait de peinture noire les panneaux en gaélique ou en basque,
personne ne se perdrait. Si on barbouille de peinture noire les panneaux en
français ou en anglais, l’ombre de l’incompréhension s’abat sur une majorité d’excursionnistes.
Telle est la réalité.
Comment
faire ? La langue minorée n’est connue que par des bilingues. Elle ne se
parle plus dans les cours de récréation ni devant les machines à café. Elle n’est
plus indispensable. Les journaux en langue minorée feraient tous faillite s’ils
n’étaient pas lourdement subventionnés. La plupart publient un mixte
d’articles, basques, gaélique, français anglais.
Si
les patriotes bascophones veulent se faire comprendre, ils doivent s’exprimer
dans la langue majoritaire, Vous les défenseurs de la langue, regardez cette
réalité. Posez-vous la question : pourquoi est-ce que je vais apprendre le
basque ? Faites que ce soit un plaisir et pas un engagement politique, Faites
que ce soit une ouverture et pas un sacerdoce. Une récompense et pas une
punition. Une culture et pas une exclusion. Ne faites pas de la langue un
carcan identitaire. Ne commencez pas par cette dérisoire maculation qui punit
et exclut.
le pays basque est trop précieux pour l'abandonner aux abertzale
Le
Pays Basque est trop précieux pour l’abandonner aux abertzale
Les nationalistes étaient minoritaires en Pologne et le
changement conduit par Solidarnosc fut salué joyeusement par tous les
progressistes d’Europe. Ils sont maintenant majoritaires et piétinent les
valeurs fondatrices de l’Union européenne. Quel rapport avec le Pays
Basque ?
Les nationalistes étaient minoritaires en Turquie et ils
sont désormais au pouvoir. Ils célèbrent l’inscription des valeurs religieuses
dans les lois civiles et clivent les Turcs en « vrais » ou
« faux » citoyens. Erdogan veut analyser l’ADN des députés germano-turcs
qui ont voté pour la reconnaissance du génocide arménien. Quel rapport avec le
Pays Basque ?
Les nationalistes flamands creusent toujours plus profond la
division de la Belgique, en s’appuyant surtout sur des revendications linguistiques
qui dessèchent la langue et la transforment en outil politique. Quel rapport
avec le Pays Basque ?
Les nationalistes irlandais, catholiques et protestants, ont
réussi à force de crimes et de sectarisme, à diviser profondément la société
nord-irlandaise.Le président du Sinn Féin, Gerry Adams, est accueilli avec
enthousiasme par les patriotes basques.
Les nationalistes corses étaient minoritaires et ils
dirigent désormais l’île. Leurs priorités : amnistie pour les prisonniers
corses, officialisation de la langue corse, statut de résident. Ils partagent
les Corses en « vrais » citoyens et les « faux ». Les
abertzale célèbrent dans leurs publications et dans leurs discours les progrès
des nationalistes corses qu’ils donnent en exemple.
Les nationalistes basques sont minoritaires au Pays Basque
français mais ils ont réussi à faire voter une intercommunalité basque dont la
seule légitimé est d’ordre identitaire. Le président de la nouvelle communauté se
nomme Lehendakari. La nouvelle communauté officialise la langue basque, négocie
avec l’ETA pour un désarmement de théâtre, demande l’amnistie des prisonniers
en ignorant leurs victimes. Une carte de résident n’est pas encore envisagée.
Actuellement, le Pays Basque est ouvert au monde, par son
économie, par sa culture. Il brille par ses festivals du film latin, par les
ballets Malendain, par son tourisme éclectique, par ses écrivains et ses
artistes. Si les nationalistes viennent au pouvoir, ils transformeront le
basque en langue administrative, demanderont que les crédits soient réservés
aux artistes basques. Ils voudront une université de plein exercice, comme
celle de Corte où le seul syndicat étudiant est le syndicat nationaliste qui
obtient 90 pour cent des voix aux élections.
Le danger est là. Le Pays Basque est menacé de repli
sectaire, de renfermement culturel, d’isolement politique.
Le danger pour le Pays Basque n’est pas un nationalisme
militant : il a toujours été présent. Le danger est l’indifférence, la
passivité ou le suivisme à son égard. Les élus, les partis non nationalistes,
les associations se précipitent pour être au premier rang des soins palliatifs
aux etarras épuisés. Ils soutiennent les aspirations patriotes. Demain, ils
diront qu’ils n’ont pas voulu ça.
vendredi 4 août 2017
oublier
Xabi
Larralde a témoigné en faveur des meurtriers de deux gardes civils à Capbreton,
en avril 2013. « Si la Nation basque existe, elle doit avoir les mêmes
droits que les autres États. Le constat qui s’impose aujourd’hui est que du
19ème siècle jusqu’à aujourd’hui, il n’y a pas une génération de jeunes basques
qui n’aient pas pris les armes pour revendiquer des droits qu’ils jugeaient
légitimes ».
Telle
est la justification de la lutte armée de l’ETA. Les États français et
espagnols sont des états impérialistes qui refusent au peuple basque le droit à
l’auto-détermination. L’ETA a engagé sa lutte armée sous le régime de Franco et
ses actions étaient alors largement légitimées par l’absence de démocratie en
Espagne. Après la mort de Franco et il fallut justifier la poursuite de la
lutte armée. La mort de Franco n’avait rien changé : France et Espagne
restaient des nations impérialistes.
La
difficulté politique est la suivante. L’ETA a renoncé à la lutte armée en 2011.
Le caractère impérialiste des états espagnol et français est toujours dénoncé
dans les mêmes termes. Si l’impérialisme est le même, pourquoi arrêter la lutte
armée aujourd’hui ? En renonçant à la lutte armée en 2011, l’ETA condamne à
postériori ses activités terroristes. C’est pourquoi il est si difficile
d’arrêter. Comment appartenir à la première génération de jeunes basques qui ne
prend pas les armes pour revendiquer des droits qu’ils jugent toujours légitimes ?
C’est
pourquoi il est si important de légitimer par des gestes symboliques les
actions de ceux qui sont toujours considérés comme des héros ou des martyrs.
C’est pourquoi les manifestations pour les prisonniers, les rassemblements pour
un désarmement factice sont cruciaux. Il s’agit d’oublier que l’ETA déclare en
cessant le feu, qu’elle a été pendant cinquante ans une organisation de forcenés
ineptes pour qui le fusil et la bombe tenaient lieu de réflexion.
mercredi 2 août 2017
traductions
Traductions
SORTU, (les abertzale radicaux, EH Baï en France) a
organisé une manifestation devant le consulat espagnol de Bayonne suite à la
mort de Kepa del Hoyo, mort d’une crise cardiaque pendant un entraînement sportif
dans la cour de sa prison.
Xabi Larralde dénonce l’éloignement
des prisonnier du Pays Basque. Kepa était condamné, dit-il pour sa militance au
sein de l’ETA ». Gabi Mouesca déplore « le stress permanent que
génère la détention. Forcément, ça a un impact sur la santé ».
Kepa emprisonné pour
militance ? L’ETA est une organisation terroriste militaire. Les etarras
se considèrent comme des soldats. Donc Kepa a été condamné pour appartenance à
une organisation terroriste, pas pour « militance ». Xabi Larralde
insulte les patriotes en armes en les réduisant à de simples « militants ».
Miguel Angel Blanco, un
élu du Pays Basque espagnol, est mort
après avoir été kidnappé et torturé par l’ETA. Gabi Mouesca n’a jamais condamné
le « stress permanent » qu’a généré sa détention. Pourtant, un
kidnapping par l’ETA « ça a un impact sur la santé ».
Xabi Larralde dénonce l’éloignement
des prisonniers du Pays Basque. Yoyès a été abattue en plein marché,
devant ses enfants, parce qu’elle était revenue au Pays Basque. L’ETA lui
demandait alors de s’éloigner. Comment s’y retrouver si certains meurent d’être
éloignés et d’autres de se rapprocher ?
Ne chipotons pas. Retenons
les bonnes nouvelles. D’abord, ils n’étaient que 70 à manifester, à peine le
double des etarras qui se cachent encore. Ensuite, on ne signale la présence d’aucun
élu, ceux qui manifestent sur recommandation de l’ETA pour l’aider à désarmer. Ces
idiots utiles sont peut-être en vacances, peut-être qu’on les retrouvera
derrière Xabi Larralde et Gabi Mouesca à la prochaine occasion. Mais à Bayonne,
ils n’étaient pas là. Ni Michel Veunac, ni Vincent Bru, ni Max Brisson, ni Jean
Etchegarray, ni Frédérique Espagnac. Saluons leur courage.
mardi 1 août 2017
on l'appelait l'emmerdeur
On l’appelait l’emmerdeur.
Une maison est
incendiée à Hélette par de jeunes patriotes pour qui le Pays Basque n’est pas à
vendre. Le maire d’Hélette proteste : les propriétaires étaient une bonne
famille basque qui envoie ses enfants dans une ikastola. Une lettre ouverte
protestant contre l’incendie recueille trente signatures, dont cinq conseillers
municipaux de Biarritz. Pas une ligne de cette lettre dans les journaux locaux.
Un projet de
bétonnage de la plage Marbella à Biarritz est contesté par huit mille
signatures. Tous les jours ou presque, la presse locale rend compte de la fièvre.
Le projet est retiré, on se congratule.
En 1960, au Lycée
Saint-Louis, le proviseur marie sa fille. Cérémonie religieuse dans la chapelle
du Lycée, sortie de la messe encadrée par les Cyrards en tenue. À l’époque, la
classe de Saint-Cyr était connue pour ses sympathies à l’égard de l’OAS. J’envoie
une lettre publique de protestation. Je suis convoqué par le proviseur, mes
collègues me reprochent d’avoir troublé la tranquillité d’un établissement
prestigieux.
Au mois de
décembre prochain, une nouvelle cérémonie de soutien à l’égard des patriotes
basques emprisonnés rassemblera tous les partis, tous les élus, anciens et
nouveaux. Ils piétineront les tombes des cibles de l’ETA. Je porterai ma
pancarte « je réclame pour les prisonniers basques les droits que l’ETA a
refusés à ses victimes ».
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