mardi 27 octobre 2015

Identités

Le conseil fédéral du PS 64 a voté à la quasi-unanimité pour le projet d’EPCI (Sud-ouest 27 octobre 15). Selon Sylviane Alaux, député, ce vote représentait « un gros risque », mais le résultat est un « grand moment ». Pour Frédérique Espagnac, ce vote respecte les « identités du département ».

Il manque quelques éléments à ce compte-rendu du conseil fédéral. D’abord, que des sections socialistes ont voté contre l’EPCI, que d’autres n’en ont même pas discuté. Dire que les élus socialistes vont suivre le conseil fédéral est donc pour le moins hardi.

Il reste qu’une cinquantaine de membres du conseil fédéral ont voté leur soutien au projet d’EPCI. Sans discussion sur sa cohérence, sa faisabilité. Il reste dans le compte-rendu un seul argument : l’EPCI « respecte les identités du département ».

Dans une atmosphère politique difficile, le PS fuit les difficultés en se réfugiant dans le respect identitaire. Ce fut déjà le centre de la campagne des élections départementales, où il fallait « respecter le territoire », avec les résultats que l’on connaît.

Quand on respecte l’identité plus que les principes, on ne perd pas seulement les élections, on perd aussi tous les repères.


S’il y a un parti qui doit fonder sa politique sur des principes universalistes, de solidarité, de républicanisme, ce devrait être le PS. Que les autres partis bredouillent pour de mesquins calculs électoraux, c’est leur affaire. J’attends mieux du PS. 

dimanche 25 octobre 2015

révolutions


Libération donne la parole à des artistes, des metteurs en scène,  qui annoncent une révolution, tant la souffrance sociale est grande. (jeudi 22 octobre). 

Les perspectives politiques sont peu claires et la place est dégagée pour les cris de guerre, les certitudes blindées. Quand les puissances occidentales pouvaient piller les ressources naturelles des colonies, les transformer en tissus et produits manufacturés et les revendre ensuite dans un marché captif, les choses étaient meilleures pour nous. Non seulement ces échanges inégaux assuraient un niveau de vie acceptable pour les salariés européens, mais les colonies étaient terres d’émigration et de réussite professionnelle : administration, agriculture, par millions, les Européens émigraient vers les terres nouvelles d’Amérique et d’Afrique.

Tout ça est terminé. Comme sont terminées des pratiques familières : importer des mains-d’œuvre bon marché et les renvoyer quand elles devenaient inutiles, utiliser les femmes comme salariées d’appoint, pendant les guerres et puis les renvoyer au foyer au retour des soldats. Ces variables d’ajustement étaient diablement efficaces. Elles ne peuvent plus désormais être utilisées.

Le chemin de la révolution étant fermé par une saine sagesse populaire, il reste des recours protectionnistes. Les plus riches veulent blinder leurs privilèges. Les moins riches retrouvent les instincts corporatistes et identitaires pour ne pas perdre les leurs. Entre ceux pour qui le territoire est devenu mondial et ceux qui n’ont comme monde que leur territoire se joue une partie dangereuse parce qu’un terrain commun peine à se dégager.

Certains persistent à nous annoncer une révolution, une insurrection. Seule une scène de théâtre peut transformer une chemise déchirée en révolte du Potemkine.

Ça fait parfois de superbes spectacles. Pourvu qu’ils n’empêchent pas de travailler les soutiers de la politique.


liberté

La Chine communiste accorde le « Prix Confucius », un contre-prix Nobel révolutionnaire. En 2010, le lauréat fut Fidel Castro, en 2011, Vladimir Poutine, en 2015, Robert Mugabe dictateur qui règne au Zimbabwe par la terreur et affame son peuple.

Maati Monjib, historien marocain, est en grève de la faim parce qu’il n’a plus le droit de voyager.


Je déjeune, je sors acheter mon quotidien, je le lis à la terrasse d’un café et je respire avec volupté mon aire de liberté. 

détail de l'histoire

Laurent Joffrin, libé 22 octobre 15 : sur Karl Marx :

« une certaine critique parisienne s’évertue à remettre à la mode le vieux prophète du communisme (Karl Marx) en portant aux nues quelques échappés du Jurassic Park, comme Badiou ou Zizek, qui trouvent amusant de proclamer leur admiration pour Staline ou Mao, notamment dans leur œuvre principale qui a consisté à faire tuer quelques dizaines de millions de personnes coupables de ne pas comprendre …les immenses bienfaits du marxisme en actes ».


Effectivement, ce sont des révisionnistes. Pour eux, les immenses massacres sont un « détail » de l’histoire. 

dimanche 18 octobre 2015

terrtoires

Le territoire est défini par des frontières qui sont la plupart du temps des rapports de force. Toutes les frontières ont fluctué et parfois mergituré. Le territoire est défini par des langues parlées, par des religions. Rien de moins naturel qu’une frontière. Pourtant, elles revendiquent toutes une essence éternelle. La France est un hexagone délimité par des montagnes, des fleuves, des océans. Les Pyrénées séparent la France et l’Espagne, mais unissent le Pays basque grâce aux chemins de contrebande.  

L’Irlande est un bon exemple : pour les nationalistes irlandais, quoi de plus naturel qu’une île ? Pour les unionistes protestants, il était beaucoup plus naturel de traverser la Manche que de prendre le train pour Dublin.


C’est pourquoi tout nationalisme est d’abord une archéologie. Il faut rechercher des traces de l’éternité enfouies dans le sol. 

mercredi 14 octobre 2015

Pays basque

S’il n’y avait pas un mouvement nationaliste au Pays basque, qui aurait eu l’idée incongrue de rassembler en un seul « territoire » 158 communes, un conseil de 237 membres, une entité ingérable, source de conflits sans fin ? Si les objectifs étaient économiques, culturels, le respect des bassins de vie, la solidarité fiscale, jamais ils n’auraient abouti au regroupement proposé. Ils ne prennent sens  que dans une visée identitaire.

Visée nationaliste tout à fait légitime. Le nationalisme est un mouvement politique qui réclame une adéquation entre un territoire défini et un mode de gouvernement. Ceux qui s’estiment liées par une histoire, une langue, un territoire, ne se reposeront pas tant qu’ils n’auront pas un gouvernement correspondant à leur définition du territoire. Les peuples d’’Ecosse, de Catalogne, du Québec ont ainsi milité pour une autonomie de gouvernement. Ainsi que le Pays basque espagnol. Cette aspiration s’est manifestée par des élections où les nationalistes obtenaient un soutien important, parfois majoritaire.

Or la situation est radicalement différente au Pays basque français. Régulièrement, à tous les scrutins, plus de 90% de la population soutient des élus et des partis qui ne veulent pas d’autonomie, ni de regroupement avec le Pays basque espagnol. Qui ne veulent pas de correspondance entre identité et administration.

Le projet qui nous est soumis admet comme axiome qu’une majorité de la population concernée est nationaliste. C'est à dire qu’elle souhaite un mode de gouvernement correspondant à une identité basque. Batera, après avoir demandé un département basque, soutient l’EPCI comme un pas vers la reconnaissance politique du Pays basque. Les quatre maires du littoral qui renâclent « veulent tourner le dos au Pays basque ». EHbai : a toujours demandé un département basque. L’EPCI est une première étape avant d’avoir une collectivité élue au suffrage universel.  Même expression du PNB : « première étape vers une collectivité du Pays basque». Colette Capdevielle soutient depuis longtemps un département basque. « Il serait dramatique de morceler le territoire ». L’EPCI correspond « aux attentes du territoire ».

Le territoire attend, le territoire morcelé veut retrouver son unité. Le territoire veut. Il gronde. Il rugit contre les maires qui lui tournent le dos. Le territoire est mûr. « Notre territoire devra décider ». Le territoire ne peut mentir. Il a raison contre les opinions, les scrutins, les mouvements de population. Il est sacré. Les gens qui le peuplent ? On se débrouillera par la suite pour les faire entrer dans le moule qui sera ainsi créé. Il n’y a pas si longtemps, des groupements armés voulaient contourner l’opinion majoritaire par la violence sanctifiée par le territoire. Ce temps-là est heureusement révolu. Qu’on ne contourne pas à nouveau les souhaits majoritaires par des ruses administratives.

Je crains le pire. On dessine des frontières et ensuite sont citoyens à l’intérieur de ces frontières ceux qui les acceptent. Ceux qui ne les acceptent pas sont des non-citoyens. Je n’ai pas envie de vivre dans un pays divisé comme au Pays basque espagnol entre patriotes et espagnolistes. Actuellement, il y a coexistence heureuse entre les amis de la langue basque et les pratiquants d’autres langues,  des ikastolas qui sont possibles mais pas obligatoires. Une culture basque qui se développe sans entrave et coexiste avec d’autres cultures, ouvertes sur le monde. Si les institutions ressemblent à une identité unique, et non pas plurielle comme c’est le cas actuellement, il y aura forcément des dérives sectaires.


Patience. Si une majorité s’exprime clairement pour des institutions identitaires, elles verront le jour. En attendant, que coexistent gaiement les cultures qui n’ont pas besoin de nouvelles frontières pour se développer.  

dimanche 11 octobre 2015

la chemise

Si l’image d’un DRH d’Air France torse nu, chemise déchirée, a fait le tour du monde, et d’abord de la France,  c’est d’abord parce que de telles scènes sont d’une extrême rareté. « Normalement », les salariés manifestent, font grève, les négociations s’engagent, un compromis émerge, jusqu’au prochain conflit.

Avant l’émergence des syndicats, les négociations n’existaient pas, seuls les rapports de force réglaient les conflits d’intérêt. Bris de machine, tabassage d’un contremaître… Il suffisait que trois ouvriers discutent ensemble du salaire qu’ils recevaient pour que cette réunion illégale les envoie au bagne. Dans les campagnes, quand le prix de la terre devenait insupportable, des groupes de paysans le visage noirci de suie incendiaient les récoltes, mutilaient le bétail, tabassait le gérant. L’historien Eric Hobsbawm appelait ces révoltes « négociations collectives par l’émeute ».

Avec les syndicats et l’organisation, les rapports de force se décalèrent et les négociations devinrent possibles. Tant et si bien que les scènes de violence d’antan devinrent pièces d’un musée social. Quand des groupes voulurent ressusciter les violences, ils furent violemment rejetés. Les actions contre les cadres chez Renault, le meurtre d’un patron par Action directe ou les Brigades rouges, le kidnapping d’un patron au Pays basque par l’ETA pour « aider » des ouvriers en grève, furent condamnés sans aucune équivoque par les salariés et leurs organisations.

Ne tirons donc aucune conclusion hâtive d’une image qui flambe. Elle ne représente pas un danger, elle prouve la rareté de la scène.


Pourtant, les réactions à cette image donnent des informations sur la scène politique contemporaine. Un patron torse nu qui escalade un grillage c’est quand même plus drôle que des salles de discussion. Le spectacle incongru nourrit la nostalgie du bon vieux temps des affrontements à somme nulle. 

lundi 5 octobre 2015

tsunami brunâtre

A propos de la vague brunâtre sur l’identité française

Franchement, devant un tsunami, nous sommes un peu désarmés. Ne pas fuir, défendre nos idées et être convaincus que finalement restent sur la plage des débris flottants et des déchets sur les plages. L’avenir appartient à ceux qui nettoieront.