mercredi 31 décembre 2014

à vous de jouer

Le MEDEF et le Figaro se lamentent de la bureaucratie et du temps perdu pour monter un dossier pénibilité dans les entreprises. Ils ne protestent pas contre le principe. Partir plus tôt à la retraite en fonction de la dureté du travail est logique. Mais que de complications, que de paperasserie…


Pourquoi ne proposent-ils pas un moyen simplifié de mettre en place un principe qu’ils acceptent ? 

mercredi 24 décembre 2014

la peur et la haine

La peur et la haine

Ne dites pas « je ne savais pas », il suffit de tendre la main vers un livre d’histoire contemporaine. Ne dites pas : j’aurais dû, ce sera trop tard. Main dans la main, pas à pas, observez, regardez, décidez.

La première des libertés, c’est la sécurité. Qui va discuter cet axiome ? Si vous craignez d’être tué, si vous avez peur pour votre famille, vous faites vos valises et vous partez. A Belfast dans les années 1970, un protestant vivant dans un quartier majoritairement catholique, un catholique vivant dans un quartier majoritairement protestant, recevait des lettres de menaces, un caillou brisait ses vitres, il savait ce qui pouvait suivre, il rassemblait sa famille, téléphonait à une entreprise de déménagement et remplissait le camion sous les regards éplorés de quelques voisins qui étaient devenus des amis, qui regrettaient, mais comment faire ? Un catholique n’était en sécurité que dans un quartier catholique et un protestant dans un quartier protestant. Ils pouvaient aussi choisir l’exil. En Europe centrale, en Afrique, ces mouvements de population s’appelaient épuration ethnique.  A Belfast on n’osait pas utiliser le mot, trop barbare pour des sociétés occidentales et chrétiennes.

Les émotions qui se répandent aujourd’hui exhalent une odeur fétide. Si telle ou telle partie de la population est associée à la peur de la mort, la solution ne pourra être qu’une épuration ethnique. Chacun chez soi pour être tranquille, des frontières, des garde-frontières permanents, des vigilantes avec batte de base-ball et enfin nous seront tranquilles. Ce que nous disent les Zemmour Front national Roland Ménard, qui se répand dans les millions de chuchotis, c’est que pour être tranquilles, il faut l’épuration ethnique. Sur quelles bases ? Qu’importe les bases, il faut d’abord épurer, après on voit. Ouvrons les camps, on trouvera bien une population pour les remplir. Faisons des lois, on trouvera bien des criminels pour les appliquer.  Sur quelles bases ? La religion ? Et les millions d’Arabes qui ne pratiquent pas ? Sur le nom ? Mais les mariages mixtes ? L’adresse ? Mais les Arabes riches qui habitent près des Champs-Elysées ? Encore une fois, ne vous faites pas de souci. Qui veut épurer trouvera toujours les impuretés.

La difficulté c’est que la pureté totale est impossible. Il reste toujours des impuretés. Une femme qui conduit dans un pays pourtant très pur, c’est une impureté qu’il faut éliminer. Une fille qui veut aller à l’école. A éliminer. Un protestant qui ne va pas au temple le dimanche. Suspect. L’épuration ethnique est une machine infernale qui chasse les boues étrangères et concasse  les différences internes. Dans la France de Zemmour, qui osera encore manger du couscous ?


         

mardi 23 décembre 2014

fêtes

Noêl, la naissance de Jésus, Hanoukka, victoire des Macchabées sur les Grecs, Aïd, qui célèbre le sacrifice d’Abraham. Une fois par an, les rues se saisissent d’une excitation joyeuse dont les signes sont les nombreux paquets, cabas, caddies, l’accélération des pas, la lumière dans les yeux des enfants. Ce jour-là est lié à la famille, à la religion. Un jour, un événement religieux, la naissance d’un prophète, la libération d’un frère, la guérison d’une maladie, s’installe dans le calendrier  et ce jour-là la famille se réunit, mange plus abondamment que d’habitude, viande et desserts, alcool deux fois sur trois, thé et miel. Pour préparer la journée, s’ajoutent aux boutiques permanentes des étals de saison, qui présentent des cadeaux, des nourritures de Noël, de Hanoukka, d’Aïd, qui encombrent les trottoirs, débordent sur la chaussée, qu’on appelle marché de Noël ou rupture de Ramadan ou cadeaux de Hanoukka.

Dans les jours qui précèdent, les voyages se préparent, sur les quais descendent parents, enfants, accueillis par les grands-parents sourire au vent. Souvent, dans les familles éloignées des traditions et qui dénouent les règles, les grands-parents sur le quai sont des divorcés, séparés, remariés, dont les enfants sont divorcés séparés et des enfants se découvrent des frères et des sœurs de péché, les grands-parents saluent poliment les nouveaux, mais malgré tout, la fête continue et les cadeaux se multiplient avec la famille décomposée recomposée et chez qui aura lieu la fête cette année ?

En vérité, je vous le dis, ces fêtes, avant d’être religieuses sont d’abord des célébrations de familles traditionnelles et dans le grand désordre amoureux de notre temps, elles ont du mal à s’imposer. Ou alors comme substitut de normalité. Le temps d’un repas, on fait comme si.

Mais le vrai Noël Hanoukka Aïd, c’est l’ancêtre en bout de table et en bout de vie, son épouse qui a préparé le repas, les filles et les brus qui ont mis la table, les fils, les gendres qui ont porté les cadeaux et conduit la voiture, les enfants qui jouent et se disputent, tout le monde sait qui est qui, qui fait quoi.

La complicité entre les fêtes religieuses et l’ordre familial est si forte que la famille sans la religion n’est plus qu’un livret et la religion sans la famille n’allume plus que des ampoules électriques.


Imaginez que Jésus soit le fils d’un second charpentier. Qu’un macchabée épouse une Grecque. Qu’Abraham doivent sacrifier le fils d’un troisième mariage, que fêterait-on ? 

samedi 13 décembre 2014

cumul

La fondation Jean Jaurès publie un ouvrage intitulé « la politique autrement, réinventons nos institutions ».

L’auteur est  Luc Carvounas. Il est sénateur du Val de Marne depuis 2011, maire d’Alfortville depuis mars 2012 et secrétaire national du PS en charge des relations extérieures.  Chacune de ses fonctions mérite un temps complet.


La liste de ses fonctions m'empêche de lire la suite. Comment peut-on faire une "politique autrement" entravé dans les pires habitudes? 

mardi 9 décembre 2014

fête de la laïcité

9 décembre, fête de la laïcité. Pour les intervenants, pour une bonne partie des présents, la laïcité est une forteresse assiégée : la montée des intégrismes, les manifestations religieuses…


J’avance l’idée contraire : les crispations théocratiques sont dues aux succès de la laïcité, à la séparation plus grande des églises et des états, à la fois dans les lois et dans les comportements. Parmi les religieux, chrétiens, musulmans, Juifs, évangélistes, combien, quel pourcentage obéit aux prescriptions de leur église dans les domaines du mariage, de la sexualité, de la mixité ? L’Occident est l’ennemi parce que les religions qui migrent se dissolvent dans la séparation de l’église et de l’État.   La majorité des migrants se félicitent chaque jour de vivre dans un pays où Dieu est possible mais pas obligatoire.

Deuxième proposition : pour éviter l’arrogance des détenteurs du meilleur système, examiner de manière critique l’histoire de laïcité. La laïcité, dans son histoire spécifique, a été le fer de lance idéologique de la conquête coloniale : il s’agissait de porter la civilisation aux peuples indigènes, et les troupes de Bugeaud étaient toujours accompagnés des instituteurs de l’école laïque, qui faisaient par ailleurs de l’excellent travail et ont formé de nombreux rebelles.

La laïcité dans son histoire spécifique, s’est débrouillée pour que la France, pays laïque, où état et religion sont bien séparés, soit le dernier pays occidental à accorder le droit de vote aux femmes, tandis que des pays rétrogrades, comme le Royaume-Uni où religion et État vont main dans la main, accordaient le droit de vote aux femmes dès 1918.


Enfin, la laïcité, dans son histoire spécifique française, a créé, au nom de la laïcité, une école éponyme, dite école laïque, où le taux de discrimination de sexe, sociale et ethnique, place notre pays en haut de l’échelle. Tandis que des pays où la religion est enseignée dans les écoles, où la journée commence parfois par un service religieux, c'est à dire où non-laïques, sont beaucoup moins discriminants dans ce domaine. De glorieux défenseurs de la laïcité, au sommet de la Montagne Sainte-Geneviève, contemplaient leurs cohortes étudiantes d’où étaient exclues les femmes et la majorité de la société française en criant laïcité comme un coq de basse-cour chante égalité des sexes. 

dimanche 7 décembre 2014

RDA

Die Linke accède au pouvoir dans la province de Thuringe (le monde, 6-12-14). Pour que l’alliance se réalise, Bodo Ramelow, futur président du Land a dû accepter que dans le contrat d’alliance, l’ex-RDA  fût qualifiée d’ »État de non-droit ».

         Combien de communistes seraient prêts, pour entrer dans une coalition gouvernementale, à admettre dans le contrat que le système communiste était un système de non-droit ?

samedi 29 novembre 2014

pif paf boum

Paf, pif, je donne des coups, je reçois des coups, je vis dans le combat, la polémique. Quand on est d’accord avec moi, je suis le plus doux des hommes. Mais dès qu’on manifeste une réserve, une nuance, alors pif, paf, je fous des baffes, je rue dans les brancards, c’est comme ça que j’aime, ceux qui vivent ce sont ceux qui baffent.

Les occasions de baffer sont multiples et je ne compte pas parmi elles les arènes déjà occupées. Sarkozy, Zemmour, Mélenchon, le sable est rouge, les bancs occupés, les pouces levés ou baissés, je n’ai rien de spécifique à ajouter. Pour que je sois content, pif, paf, boum, je dois construire un cirque personnel, où il y aura moins de monde que sur les écrans lumineux, mais un cirque à moi, avec des monstres à moi, et une dizaine de personnes sur les bancs.

Ces temps derniers, j’ai ainsi affronté à mains nues les anciens terroristes de l’ETA qui veulent rompre avec le terrorisme en répétant partout que le terrorisme était nécessaire. Puis, au sein du PS local, je me suis mesuré avec des gardiens du temple qui préfèrent un  PS dans l’opposition qu’un PS engagé dans des alliances porteuses d’avenir. Pif paf, le combat se poursuit.

Combat le plus récent, avec mon collègue John Mullen, front de gauche extrême dont le combat actuel est d’obtenir l’interdiction à Saint-Denis d’une exposition sur l’esclavage, une expo qui a déjà provoqué des remous à Londres de la part des propriétaires patentés de l’antiracisme. Comme les Juifs à New York qui ont manifesté contre  The Death of Klinghoffer, les chrétiens qui ne supportent pas des films de Pasolini, les Noirs aux États-Unis qui ont manifesté contre le film sur l’esclavage Django de Tarentino. Chacun est propriétaire de son combat. Déjà, à l’époque où des musulmans intégristes brûlaient les livres de Salman Rushdie, des gauches extrêmes demandaient qu’on comprenne la colère des fascistes verts. D’ailleurs, quand les nazis brûlaient des livres à Berlin, avant de les condamner sans savoir, il faudrait jeter un coup d’œil sur les livres brûlés, on pouvait aussi comprendre leur colère.

John Mullen, qui a toujours mangé léger afin de pouvoir se glisser toujours à la gauche de la gauche dans toutes les manifestations, est à la tête des manifestations pour l’interdiction de l’expo au théâtre de Saint-Denis. La gauche de la gauche est un gauche qui censure, une gauche stalinienne, une gauche poutinienne. Mon ami John Mullen, un ancien étudiant à moi à qui je n’ai rien appris, manifeste pour l’interdiction et n’aime pas mes insultes. Mais moi, je suis heureux, pif, paf, baffes.


vendredi 28 novembre 2014

jumelages

         Le peuple français se compose des habitants de la rue Erckmann-Chatrian en face de l’école Richomme, trois numéros, trois immeubles, des peintures murales, voir photo, et des habitants de la rue Raymond Weil, face à l’école Paul Bert, trois numéros. Raymond Weil était un universitaire juif, déporté pendant la Seconde Guerre Mondiale, qui a survécu pour faire carrière universitaire. Le médecin Charles Dumora, radical de gauche, a demandé et obtenu que la mairie de Biarritz accorde à son nom un court ruban de bitume, entre trois immeubles et un mur d’enceinte d’où les enfants réclament les jours ouvrables le ballon qui est passé de l’autre côté. Erckmann et Chatrian sont des écrivains classiques français, auteurs de nombreuses dictées dans les écoles primaires. Les voilà échoués au centre de la Goutte d'Or. Ne pourrait-on pas échanger Erckmann et Chatrian contre Raymond Weil, qui serait plus à l’aise, peut-être, dans un quartier cosmopolite, alors que Erckmann Chatrian, longeant une école de la république, en tendant l’oreille, pourraient entendre les maîtres déclamer les textes de leurs dictées. 

avec des amis comme ça...

« Le monde » 27-11-14 :  Sur l’IVG, il faut reconnaître au gouvernement quelques actions à mettre à son crédit depuis 2012 : remboursement de l’IVG à 100%, gratuité de la contraception pour les mineures, meilleur référencement internet, … »

Mais pour la coprésidente du groupe écologiste, Barbarie Pompili, « ce n’est pas qu’une question de moyens mais aussi de philosophie ».

Quand le gouvernement exprime ses intentions, on lui demande les moyens de ses intentions, quand il met les moyens, on lui demande les intentions de ses moyens.




La peinture à l’huile, c’est bien difficile, mais c’est bien plus beau que la peinture à l’eau.  

on respire

27 avril 2014

Le prix du pétrole va baisser. Pour les sociétés de transport, je l’ai entendu aux info de France 2 20 heures, cette baisse est « une bouffée d’oxygène ». Ils ont osé. Le pétrole comme bouffée d’oxygène. 

dimanche 23 novembre 2014

privilèges

         Les responsables socialistes sèment des pièces de puzzle, aux militants de retrouver la trame de leur politique. Jamais aucun pouvoir n’a fait autant confiance en l’intelligence des militants qui l’ont soutenu et qui maintenant l’accompagnent. D’autres nous présentent des prêts à penser, des recettes en kit. Pas nos chefs. Ils nous créditent d’une intelligence hors pair pour deviner le chemin suivi. Aujourd’hui, la fin des contrats à durée indéterminé. Des contrats précaires qui pour la gauche aux aguets  sont le signe d’un glissement à droite.

         A nouveau, il faut réfléchir. Partir de nos grands principes pour analyser les fragments d’une politique en construction. J’ai longtemps vécu avec l’idée que le fond d’une politique de droite est la protection des privilèges et que la gauche se doit de faire bouger les destins assignés par le territoire, l’origine ethnique ou la classe sociale.

         Or, une partie importante de la gauche, y compris la plus extrême, n’a cessé de défendre les situations acquises. Fonctionnaires contre emplois privés, emplois statutaires contre les précaires, hommes contre femmes, nationaux contre immigrés, titulaires contre précaires. La défense par le parti communiste des ouvriers les plus privilégiés, notamment dans la presse, est présente dans toutes les mémoires ouvrières.

         Universitaire, j’ai longtemps été confronté à cette défense corporatiste. Que rien ne bouge. Dans les universités et les centres de recherche, des titulaires qui ne faisaient plus depuis longtemps de recherche, qui n’avaient rien produit depuis la soutenance de thèse, complétaient leur mince service  par des heures supplémentaires dans les grandes écoles où se préparaient à entrer leurs rejetons. Quand il était suggéré qu’un universitaire qui n’avait mené aucune recherche depuis des années pouvait assurer quelques heures de plus pour aider les collègues qui préparaient leur thèse, les réactions étaient tsunamiques. Quand Claude Allègre a proposé de ne plus payer les heures supplémentaires non faites dans les classes de prépa, tous les anciens normaliens, de l’extrême-gauche à la droite traditionnelle, se sont retrouvés place de la Sorbonne pour défendre le triangle d’or du Quartier Latin, Louis le Grand, Henri IV, Saint-Louis.  

         Aujourd’hui que les vents contraires se lèvent, la protection des prés-carrés est devenue plus urgente. Chacun s’arque boute sur son échelon. Les notaires, les chauffeurs de taxi, les pharmaciens, se présentent comme les prolétaires du XXIème siècle. Les habitants des ghettos dorés manifestent contre les logements sociaux le matin et pour la famille traditionnelle l’après-midi.

         Pour améliorer les carrières de tous, il faut secouer les situations acquises. Pour améliorer les carrières du grand nombre, il faudra mettre fin à la sécurité d’emploi pour une partie des salariés.


         Mais pour que les réformes fonctionnent et  soient acceptées, il faut que le haut donne l’exemple. Gérard Collomp propose une plus grande précarité dans les contrats de travail mais défend le cumul des mandats pour les élus. Un pouvoir de gauche pourra réformer de manière plus paisible s’il commence par le haut. S’il propose des contrats plus souples, sans doute nécessaires, en multipliant les Académies d’Immortels, immuables, intouchables, dans les entreprises, les cabinets et les administrations, il sera mal entendu. 

vendredi 14 novembre 2014

ce qui est rare est cher

Les chiffres et les statistiques sont impuissants. Une petite fille disparue, violée, assassinée, tiendra en haleine les journalistes et les téléspectateurs pendant des jours et des jours. La quête, la poursuite, l’arrestation, le jugement. Des heures et des heures de journal du soir, des radios de la mi-journée. Dix personnes noyées dans le Verdon, moitié moins de temps. Une école anéantie en Afrique, quart de temps. Ce qui est rare est cher. Les crimes rares sont les plus bruyants. Les assassinats par voiture sont silencieux. Les femmes qui meurent au foyer, une tous les trois jours, sont muettes. Les associations qui demandent qu’on « en parle davantage » mettent la charrue avant les bœufs. Quand elle fera la une des journaux, la violence conjugale aura considérablement reculé.

jeudi 13 novembre 2014

pas de quartier

         Pendant que j’étais à l’hôpital de Bayonne pour choisir une prothèse de la hanche, la vie politique s’est figée. Très exactement du 4 novembre au dix novembre. Je suis sorti lesté, pour les uns nonocop, les autres tontoncop et avec mes cannes anglaises, je saute par-dessus les ruisseaux.


         Éric Zemmour habitait dans la Goutte d'Or rue Doudeauville. Il y retourne vingt ans après l’avoir quittée. Il avait l’impression d’avoir changé de continent. « Les trafics, les tissus, les coiffeurs afro, il n’y a plus un blanc rue Doudeauville ». (le monde, 10 nov 14). Effaré, je le suis, parce que j’habite la Goutte d'Or depuis vingt-cinq ans et que depuis vingt-cinq ans, il est dans l’état où le découvre Éric Zemmour. Si le quartier a changé, c’est dans le sens d’une plus grande intégration. Éric Zemmour a peur de la Goutte d'Or et moi j’ai peur d’Eric Zemmour. 

lundi 27 octobre 2014

Alain Badiou dans libération 27/10/14

Alain Badiou dans libération 27/10/14

A propos de la révolution culturelle, Alain Badiou reprend l’argument familier : tous les états démocratiques ont autant de sang sur les mains que les états communistes. Il cite la guerre de 14-18, les guerres coloniales, la seconde guerre mondiale.

Chaque fois que je parle à mes amis qui sont restés communistes des morts du goulag, des victimes de Pol Pot, des famines en Chine et en Ukraine, ils me répondent comme Alain Badiou, et les autres millions de morts, je ne veux pas en parler ? Chaque fois, je leur réponds que les massacres du communisme, à la différence des autres que j’ai généralement combattus, se sont faits en mon nom, au nom de tous les communistes, qui en ont été complices.

Alain Badiou franchit une étape supplémentaire. Maintenant que les massacres du stalinisme maoïste sont connus, ils sont largement condamnés. Pas par Badiou. Il leur trouve des aspects positifs, l’entrée en politique des masses populaires, etc. Quand des intellectuels trouvent des aspects positifs au système nazi, on les appelle révisionnistes, on les appelle négationnistes. Il n’y a pas encore de nom pour les révisionnistes de gauche, pour les négationnistes de gauche, ils ont droit de cité et ne provoquent pas de mouvement de répulsion.

Quand on me demande la différence entre stalinisme et nazisme, ma réponse est la suivante : il est possible d’être négationniste, d’être révisionniste pour les crimes staliniens, alors que pour les crimes nazis, c’est moins bien porté. Pas sûr que Faurisson ou Dieudonné aurait eu l'honneur de dialoguer dans les colonnes de Libération. 



dimanche 26 octobre 2014

à chacun de parler

Ne nous arrivent que les condamnations stridentes de la politique gouvernementale, de la part de la droite, naturellement,  de la gauche extrême, évidemment, et de plus en plus de la part de membres de la majorité qui gouverne, ce qui moins naturel.

Les défenses argumentées de ceux qui gouvernent sont plus faibles, moins présentes. Le parti socialiste est engourdi. De temps en temps, une conférence de presse, et puis tout repart.

Moi-même, personnellement, je suis confronté à des gens de gauche qui disent, nous n’avons pas voté pour cette politique, le chômage augmente, on fait des cadeaux aux entreprises et on assomme les salariés.

Je n’ai pas l’impression de disposer d’arguments solides pour répondre. Pas tellement sur le fond, mais affecté d’un malaise provoqué par les hésitations, les reculs, les bégaiements permanents. La taxe carbone, les réformes des professions protégées, les déclarations intempestives sur les droits des chômeurs. Un jour on prend, un jour on reprend.

Gouverner, ce n’est pas passer son temps à peaufiner l’argumentaire des militants socialistes. Mais quand même on aimerait être davantage aidé.

Et si on essayait quand même avec nos pauvres connaissances ?

La droite nous a légué un déficit chronique en constante augmentation. Des outils de production poussiéreux. Une dépression morale préoccupante. Nos engagements européens, les règles mondiales, nous contraignent à réduire le déficit, à réformer les administrations, les outils de production. Dans une Europe où la droite est majoritaire, où menace de plus les partis politiques de repli nationaliste et d’égoïsme. Dans un monde où la concurrence des pays émergents est rude. Dans ces conditions, les marqueurs d’une politique de gauche sont : réduire le déficit en faisant porter l’essentiel de l’effort sur les revenus les plus élevés et assurer aux plus démunis une amélioration de leur niveau de vie. Cela s’est fait, mal, dans le brouillard, mais le bilan est positif.

Deuxième marqueur : intervenir en permanence pour une meilleure régulation des règles mondiales, pour contrecarrer les folies furieuses d’une spéculation débridée. Le recul des paradis fiscaux, les interventions à l’échelle européenne, dans les conditions politiques où la gauche est minoritaire, parviennent miraculeusement à obtenir des résultats.

Ce n’est pas beaucoup, ce n’est pas glorieux, il n’y a pas de quoi chanter sur les toits. Mais il y de quoi estimer que le bilan n’est pas médiocre. Si l’on veut faire partager cette idée, il faut d’abord que les responsables de ce bilan aient une bonne estime d’eux-mêmes. S’ils passent leur temps à se dénigrer mutuellement, comment voulez-vous que les citoyens les apprécient ?


mercredi 22 octobre 2014

antiquités

KF philo 22 octobre 2014

Capitalisme et besoins. Le capitalisme est un système qui ne vise pas à satisfaire les besoins, mais à faire des profits. Il est à bout de souffle, il va s’écrouler et il faut que les citoyens, les travailleurs, prennent en main leur destin pour construire un système qui va le remplacer.

Face au conférencier, mes cheveux noircissent, mes poumons se décrassent, mes yeux percent à nouveau l’obscurité, et je me retrouve jeune communiste en 1948, dans une école de section, en train d’écouter avidement les mêmes prophéties. Mot pour mot. Rien n’a changé. Vous pouvez retrouver les brochures dans les archives. Soyons juste. Le conférencier dit quand même une phrase sur les systèmes soviétiques dont les intentions étaient louables mais les effets pas toujours positifs.

Rien sur le monde tel qu’il est. Un discours clos, sans lien avec la réalité, sur les capacités du capitalisme (propriété privée des moyens de production qui permet d’exploiter la nature et les hommes), de s’adapter. De se transformer. Rien sur les résultats obtenus par les luttes sociales, politiques, culturelles. Il reste un rouleau compresseur et des peuples soumis. Que des centaines de millions de pauvres soient sortis de la pauvreté à l’intérieur de ce système ne pose pas de question. Que les systèmes sans exception où la propriété privée des grands moyens de production a été étatisée, collectivisée, ont conduit à la famine, à des camps, à l’extermination des peuples, ne pose pas question. Que les grands mouvements de population poussent les migrants à se diriger vers les pays où le capitalisme est le système dominant et que rares sont les migrants qui se dirigent vers la Corée du Nord, vers Cuba ne pose pas question. Que les soulèvements massifs de population dans les pays émergents s’affrontent d’une part aux dictatures politiques et aspirent à un système économique où la concurrence de type capitaliste s’accompagnerait d’un système démocratique et parlementaire, ne pose pas question. Que la moitié des richesses produites dans les grands pays capitalistes soient consacrés à la satisfaction des besoins individuels et collectifs : santé, éducation, protection sociale, transports, etc…ne pose pas question. Que des millions de militants syndicaux, politiques, associatifs, aient obtenu de tels résultats et continuent de se battre pied à pied pour les conserver et les améliorer ne pose pas question. Et que la plupart de ces militants constatent que c’est dans ce système et pas ailleurs que leurs possibilités de lutter et d’obtenir des résultats ne pose pas question. Que c’est dans ces pays et pas ailleurs que se développent les grands mouvements d’émancipation que sont l’écologie et le féminisme ne pose pas question.


Discours clos, démobilisateur. L’avenir : ou bien le capitalisme s’effondre, ou bien la révolution le remplace par un autre système. A vouloir tout, on n’obtient rien. Tout ce qui change, qui réforme, qui améliore, n’est qu’un leurre. En attendant, on crie et entre deux cris, on s’endort. 

lundi 20 octobre 2014

le passé est présent

         Puisque l’ETA a déposé les armes et que d’ IK il ne reste que les morts et les années de prison, pourquoi discuter aujourd’hui de ce qui est terminé ?

         Parce que dans les pays où la terreur a été le moyen privilégié de la politique, son bilan, son examen, sa condamnation, sont des étapes nécessaires. Partout. Voyez l’Irlande du Nord. Pour permettre la nouvelle étape qui associe catholiques et protestants au gouvernement, il faut découvrir les charniers, déterrer les morts, publier des livres d’histoire. Dans la Russie de Poutine, on interdit les centres de recherche comme Memorial et les anciens du KGB sont portés au pouvoir.

         Oui, vous me faites peur, Gaby Mouesca, à nommer « cris » des meurtres et des attentats, car c’est vous qui décidez si la situation mérite de pousser ces cris ou de ne pas les pousser. Demain, si vous estimez de les pousser à nouveau, vous le ferez.

Vous refusez la justice et la démocratie. Quand on commet des crimes, seule la justice est légitimée à juger les criminels. Pas pour vous :

« Seuls nos enfants seront légitimés à nous juger ». Et si les enfants de vos victimes se mettent à pousser des cris, seuls leurs enfants seront légitimés à les juger. « Seuls nos enfants pourront nous juger ». C’est le mort d’ordre de toutes les sociétés où règnent la vendetta et la terreur. 

dimanche 19 octobre 2014

le cri

Ma réaction au documentaire « génération des autonomistes basques » France 3 6 octobre 14, est publiée dans la Semaine du Pays basque du 17 octobre 14 suivie d’une « réponse » de Gaby Mouesca.

Le Pays basque était occupé, humilié et la lutte armée, les attentats, les prises d’otage, étaient des « cris » contre ces humiliations. IK a « recouru à la lutte armée comme on lance un cri ».

Ainsi, dans les coffres de voitures ne se trouvaient pas de la dynamite, mais des cris. La poudre qui expulse la balle est un cri, la balle qui pénètre la chair humaine est un cri.


Mille fois ces cris ont été poussés et mille fois des victimes ne se sont pas relevées tant ces cris étaient stridents. Yoyès fut victime d’un cri. Les conseillers municipaux, les élus du Pays basque ont été victimes de cris. Vingt ans de prison pour avoir poussé un cri, c’est cher payé. 

vendredi 17 octobre 2014

intégrismes

Biarritz. Vendredi matin 17 10 14. Je sors de la libraire Victor Hugo. Je croise un prêtre ensoutané discutant avec une commerçante. Depuis le temps, je me suis préparé. Monsieur, puis-je vous dire un mot ? Monsieur en dit beaucoup, je m’exclus par ce monsieur de la communauté des catholiques. Je ne peux quand même pas dire « mon père », mon père est mort depuis près de quarante ans, enterré au cimetière de Bagneux. Monsieur, les paroles coulent parce que je les ai répétées mille fois en croisant les curés intégristes qu’impose Mgr Aillet à son diocèse.   Monsieur, en portant cette robe noire, vous n’avez pas l’impression de vous exclure du monde ? Exactement comme les femmes musulmanes qui portent une burka ? Non, au contraire, me répond-il, sa réponse n’a aucune importance, l’important, c’est que j’ai trouvé l’occasion de le lui dire, et bien entendu il n’allait me répondre, je suis coupé du monde. Il m’a répondu au contraire. Il m’a dit qu’une burka ce n’est pas pareil. Pourquoi ce n’est pas pareil ?

Goutte d'Or. Souvent j’ai eu envie, mais je ne l’ai jamais fait. Envie de m’approcher d’une femme voilée partout et lui poser la même question. Je ne l’ai jamais fait, je ne le ferai jamais. Pourquoi cette différence de traitement ? Peut-être parce que je considère le prêtre intégriste comme revendiquant son appartenance à une caste supérieure alors que la femme voilée est plus victime qu’arrogante. Le prêtre ensoutané est un cadre supérieur de l’intégrisme, la femme voilée en est l’esclave. En me révoltant contre le prêtre, je suis à égalité. Pour la femme voilée, je fais partie des puissants. Je ne suis pas son égal.


mercredi 15 octobre 2014

sur commande

Ce matin, dans toutes les écoles et tous les collèges, les enseignants se réunissent pour discuter des contenus de l’enseignement. Tous en même temps, à la même heure. Les écoles seront fermées et les enfants mis en garderie.

Tous en même temps, à la même heure, ils diront aux parents, aux enfants, à la nation, qu’ils sont très soucieux des programmes scolaires, mais qu’ils n’ont pas trouvé les deux heures nécessaires pour en discuter hors service, il faut donc fermer les écoles pour leur donner ce temps.


La majorité des enseignants consacrent leur temps et leur intelligence à éduquer, transmettre, former, sans compter. Ils reçoivent les parents, ils discutent, ils améliorent. En plus de leur service. Leur dévouement est masqué, brouillé par une incroyable lourdeur administrative qui veut faire croire au pays qu’ils ne réfléchissent à leur métier que sur injonction ministérielle.  

mercredi 8 octobre 2014

ils ne regrettent rien

France 3 diffuse le 6 octobre un documentaire « génération des autonomistes basques ». sur IK (Iparretarrak). Les anciens sont interviewés. Philippe Bidart, Gaby Mouesca, Cyrille Perez…

Ils ont participé à des actions armées, ils ont fait de la prison, tué des soldats et des gendarmes, détruit des agences immobilières, des banques. Avant, disent-ils, nos parents avaient honte d’être basques. Aujourd’hui, on a le sentiment d’appartenir au même peuple.

La nouvelle génération, celle d’IK, rompt avec les modérés d’Enbata. Ils commencent les actions, les coups d’éclat. Ils font sauter les agences immobilières, les syndicats d’initiative, Ils ne voulaient pas que le Pays basque soit « le bronze-cul de l’Europe».

Puis on passe aux choses plus sérieuses : des agressions physiques, deux militaires tués, des gendarmes, des attentats. Les hauts faits d’armes : la libération de la prison par un commando. La fille du directeur de prison prise en otage. Ils sont tous fiers, c’était très bien préparé.

« J’aime le pays basque, c’est pour ça qu’on m’a emmené en prison » dit la chanson.

         Ils racontent tout ça l’air buté, le béret vissé sur la tête. Ils n’expliquent pas bien pourquoi la lutte armée s’est arrêtée sans avoir rien obtenu. Ils ne racontent pas les tensions avec le Pays basque sud. Au Sud, les etarras auraient préféraient avoir une région de repli tranquille. Mais les nationalistes du Nord se sentaient floués. Eux aussi voulaient être des hommes, des vrais, prendre la dynamite et le fusil, ne pas être cantonnés dans l’hôtellerie. La  lutte armée au Pays basque Nord a eu d’abord cet objectif : montrer que les nationalistes de France étaient aussi courageux que les combattants d’Espagne. Quelques morts, quelques dizaines d’années de prison, quelques bâtiments détruits, la fille du directeur de prison prise en otage, ils ont gagné leur place au Panthéon nationaliste. Ils ont le droit de définir qui est basque et qui ne l’est pas. Sont basques ceux qui s’inclinent devant l’héroïsme de IK. Ne sont pas basques ceux qui n’admirent pas les fronts butés, les certitudes ombrageuses, le vide de la pensée.


lundi 6 octobre 2014

belfast ma stupeur

Belfast mon amour documentaire de Frédéric Tonolli et Arnaud Hamelin, France 5, dimanche 5 octobre 14.

L’histoire des troubles à travers un « fait divers » : un homme assassiné, sa fiancée se suicide un mois plus tard. Une confusion impénétrable. Les « troubles » sont tantôt une guerre entre protestants et catholiques, puis une guerre entre l’IRA et l’armée britannique, puis une guerre entre paramilitaires protestants et républicains.

Les journalistes de l’image ont-ils le droit d’être paresseux ? Ont-ils le droit de se dispenser de lire quelques livres sur le conflit ? Certains, s’ils n’ont pas le temps de lire, demandent à des chercheurs de les conseiller.


Pas F. Tonolli et A.Hamelin. Ils se sont passés de conseillers scientifiques. Ils ont construit le récit des troubles à partir de quelques tracts républicains, d’entretiens avec des nationalistes. Ils se seraient contentés de filmer un drame, celui d’une fin tragique d’un amour adolescent, pourquoi pas ? Mais ils voulaient faire l’histoire des troubles en racontant une tragédie singulière. Le résultat prend place dans la longue liste des sottises qu’ont engendrées le conflit nord-irlandais. 

dimanche 5 octobre 2014

manif pour personne

J'avais préparé ma pancarte (je demande pour les prisonniers basques les droits que l’ETA a refusés à ses victimes). Ils ne sont pas venus manifester. ils oublient leurs prisonniers, je n'oublie pas leurs crimes.

jeudi 2 octobre 2014

intermittents

Sur Facebook ne s’inscrivent que les bonnes nouvelles. Les naissances, les mariages, les spectacles, les publications, les photos de vacances. Les mauvaises nouvelles n’apparaissent jamais sur Facebook. Si les historiens du futur ne disposaient que des archives Facebook, ils pourront retrouver les traces d’une société heureuse. Pas de nécrologie sur Facebook.

L’ensemble de personnes que nous appelons société vit généralement dans l’intermittence. La majorité. Une minorité vit dans l’assurance que l’avenir est bouché, que demain sera pire qu’aujourd’hui et aujourd’hui meilleur que demain. Une petite minorité vit dans la certitude que l’avenir lui appartient, que ses désirs sont des ordres, que ses envies seront exaucées. Entre les deux, des intermittents qui ne sont jamais sûrs. D’après Facebook, ils sont heureux et souriants. D’après l’écran de télévision, ils sont inondés, chômeurs, malades.

Ainsi, moi personnellement, je vous donne un exemple, mais il pourrait y en avoir tellement d’autres. Je vis en couple non marié. Si vous épousez une conseillère municipale, vous aurez droit à un passe pour l’ensemble du Festival du cinéma d’Amérique latine. Si vous êtes seulement concubin, vous aurez droit à quelques tickets, une invitation pour la soirée d’ouverture, une pour la soirée terminale, et c’est tout. Une invitation pour le cocktail, non. Invitation pour une seule personne, et vous imaginez la scène, vous arrivez à l’entrée de la salle de cocktail, on laisse passer votre concubine conseillère, et vous, c'est à dire moi, le cerbère dit non, comme si j’étais une racaille à l’entrée d’une boîte de nuit. Or cette scène pourtant trépidante et pleine de sens parce qu’elle exprime l’intermittence de la vie, ne se trouvera jamais ni sur Facebook, ni au journal de vingt heures.


Pourtant, l’intermittence, c’est la vie. Celui qui n’est sûr de rien déprime, galère, plonge. Celui qui est sûr de tout s’atrophie. Seuls les intermittents sont inventifs, actifs, entreprenants, chercheurs, car ils sont constamment au bord du gouffre, ils doivent pédaler pour rester en équilibre. 

que reste-t-il?


Laurent Cantet, Retour à Ithaque, scénario de Leonardo Padura. Sur la terrasse d’une maison à Cuba, face à la mer, dos à la ville, d’anciens amis se retrouvent et parlent du passé. L’écrivain s’est exilé, il n’a plus écrit. Le peintre est resté, on l’a interdit d’exposition. La doctoresse s’étiole, ses enfants vivent à l’étranger. L’apparatchik apporte du whiskey autant que vous en voulez. Le noir y a cru, s’est battu en Angola, et il regrette les moments où il croyait. « Ils », derrière « ils », ceux qui ont le pouvoir, ils ont utilisé nos croyances pour nous manipuler. Et si la croyance ne suffisait pas, ils nous faisaient peur. Les mains qui tremblent. La peur de la prison, de la répression, la peur de perdre le travail. La peur. Un demi-siècle de communisme a détruit plus de deux générations, démoralisées, servile ou corrompues. Un tableau de Cuba qui émerge de ces conversations jusqu’à l’aube qui ne laisse rien à sauver du castrisme. Le film va-t-il être diffusé à Cuba ? Guère probable.     


Un film à voir pour ceux qui ont conservé du communisme au moins une certaine nostalgie pour le castrisme. Si ce lambeau est balayé, il ne restera plus que la Corée du Nord.

une main fraternelle

Tu exagères, me dit un ami de la section socialiste de Biarritz. C’était quand même le bon temps. L’excitation, la camaraderie, la chaleur, le bon temps de l’engagement collectif, des lendemains qui chantent. Veux-tu venir en parler ? Bien entendu, Je suis prêt à porter la mauvaise parole partout où elle risque de ne pas être entendue. Quand nous tendions la main aux socialistes, c’était une main fraternelle. Une main de fer. 

mardi 30 septembre 2014

festival

Festival du film latino. Présentation des membres du jury, congratulations, je suis ravi d’être ici, nous sommes heureux et fiers de vous recevoir, la grande salle est pleine, au centre vers l’avant, genre dix ou vingtième rang, les invités, élus des régions qui financent, ambassadeurs des pays qui ont aidé à la programmation, membres des jurys.

Le film argentin relatos salvajes est un film à sketch, dans l’esprit d’Affreux, Sales et méchants d’Ettora Scola. Le pays qui ressort de ce film est pourri, corrompu, méchant, avide, mesquin, sauvage, on rit beaucoup.

A la sortie, tout le monde avait un large sourire, se rappelait les scènes les plus atroces, la bonne humeur régnait sur le parvis. Avant le début des cérémonies, Paulette se plaignait de la mauvaise humeur générale, Brigitte trouvait que ses collègues du conseil geignaient beaucoup.

Tous ces gens se retrouvaient dans la grande salle de la gare du Midi avec un grand sourire, s’esclaffaient pendant la projection, s’exclamaient au générique, applaudissaient à tout rompre, mettaient des bonnes notes sur les bulletins de vote.


Le lendemain, autour de la table, café croissant, vue sur la mer, ils écouteront les informations et feront la gueule. 

dimanche 28 septembre 2014

biarritz barbès

Biarritz Barbès

J’ai longtemps été persuadé que le déficit de culture citadine était lié au statut social et que les gens qui appartiennent aux classes possédantes, éduquées, habitant l’Ouest parisien et le Sud-Ouest aquitain respectent mieux les règles de frottement urbain que les pauvres, étrangers, immigrés, pouilleux de campagne, banlieusards, chômeurs longue durée, consommateurs de drogues et de tabac. En tout cas, à Paris, selon une étude personnelle non publiée, plus on va vers le Nord et moins la règlementation des voyages en transport public est respectée. En descendant du métro à Jasmin ou Molitor, les aspirants voyageurs sont rangés de part et d’autre des portes coulissantes, porteurs du Figaro ou de Valeurs actuelles, laissent descendre et commencent leur ascension après la dernière goutte de voyageur. Si vous descendez du métro à Barbès ou Château-Rouge, les aspirants voyageurs, lecteurs de Vingt minutes ou de Gala, sont pressés devant les portes coulissantes, ils poussent déjà vers le métro alors que le premier voyageur n’a pas mis le pied sur le quai, les aspirants descendeurs crient, « laissez descendre » et les aspirants monteurs dénoncent le racisme des descendants.

Je m’étais donc installé avec ces idées dans la tête, idées confortables, partageant le monde en deux groupes sociaux distincts, les privilégiés respectueux des lois qu’ils savent faites pour eux, et les naufragés qui ne voient pas pourquoi ils respecteraient des lois qui ne sont jamais faites pour eux.

Je me trompais. Je constate, après avoir mené une étude personnelle non publiée sur le « flux et stratification sociale dans la navette gratuite de la ville de Biarritz », que le monde est plus complexe que les lambeaux de marxisme vulgaire qui m’encombrent encore la tête ne le laisseraient croire. Les heures de pointe dans cette ville ne sont pas liées à la sortie des usines et des bureaux, mais plutôt aux remontées de plage, aux fins de sieste, aux décisions de sortie pour les courses indispensables. Les apprentis voyageurs qui se pressent aux arrêts sont généralement bac plus cinq ou six. Les cannes de noyer verni ont des poignées en cuivre et rares sont les modèles remboursés par la sécurité sociale. Et pourtant, ces privilégiés du transport se pressent devant la porte coulissante et les descendeurs potentiels sont obligés de les repousser physiquement et verbalement.

L’un des avantages de ce jumelage Biarritz Barbès est de nous débarrasser des idées reçues.


anachronique, ma bataille?

Lydie Salvaire, dans Pleure pas, 2014, développe deux personnages dans l’Espagne en guerre civile : Josep et Diego. Josep est anarchiste, Diego le stalinien. Leurs idéaux s’écroulent en même temps que se défait le camp républicain. Ils étaient vaincus, mais pire : aujourd’hui, ils ont encore les « vaincus de l’histoire ». Cités dans son roman, Bernanos qui s’élève contre les massacres franquistes bénis par l’église dans Les grands cimetières sous la lune, et André Gide, qui dénonce le système bolchevique dans son Retour d’URSS, s’en sortent mieux.

Qui sont les vaincus de l’histoire ? L’histoire connaît-elle des vaincus et des vainqueurs ?

Ceux qui ont été entraînés dans les folies de leur siècle, y ont trouvé chaleur et complicité ont du mal à s’en séparer car la rupture remet en cause l’engagement d’une vie. Allez donc dire aux porte-drapeaux qui attendent toute l’année les deux grands évènements que sont le 14 juillet et le 11 novembre, allez donc leur dire qu’ils ont mené des guerres injustes. Les anciens nationalistes de l’ETA ou de l’IRA sont célébrés par tous comme des compagnons de fidélité, et par leur camp comme des héros. S’ils disent : « nous nous sommes battus pour rien », ils seront pour leur camp des repentis et des traîtres, et pour les autres des anciens terroristes. Ils se retrouvent dans le vent glacé des défaites infinies.

Il faut donc du courage pour rompre avec les folies du siècle. Ceux qui ont rompu quand il fallait audace et lucidité, ceux qui ont dénoncé les crimes quand ils se commettaient, les procès quand ils étaient joués, ceux-là sont des héros. Ils ne sont pas des « vaincus de l’histoire ». Ceux qui condamnent après avoir été longtemps complices alors que la condamnation est unanime, ils condamnent Pol Pot, le goulag, les exécutions, les déportations, que faisaient-ils quand les millions tombaient sous des balles rouges ? Ils approuvaient ou regardaient ailleurs. Et maintenant, ils veulent crier quand c’est trop tard, à grands coups de véhémence anachronique.

Il y aurait de quoi se décourager si telle était la réalité. Pourtant, à voir les réactions autour de nous quand on mène la bataille contre le communisme et ses avatars, on se dit qu’elle n’est pas entièrement dépourvue d’intérêt.


samedi 27 septembre 2014

la faute à qui?

Quand les enfants ont peur du loup, on ne dit jamais c’est la faute aux loups. On essaie de soigner leurs craintes. Quand des adultes ont peur de prendre l’avion, on ne dit jamais c’est la faute aux avions, on essaie de les rassurer. Mais quand les gens ont peur des Arabes ou des Noirs ou des Juifs, on pense que c’est la faute aux Arabes ou aux Noirs ou aux Juifs. 

vendredi 26 septembre 2014

racisme

j'ai participé à l'ouvrage collectif "Cent mots pour comprendre le racisme et l'antisémitisme, éditions le bord de l'eau. Faites passer...

jeudi 25 septembre 2014

cumul

Etats généraux du PS. Biarritz 24 septembre 2014.

Le monde est en plein bouleversement et nous, militants socialistes, nous disposons de moyens de réflexion et d’intervention politique qui datent du siècle dernier. Dans ces conditions, tous ceux qui affirment disposer de réponses à nos difficultés sont des menteurs ou des illuminés.

Hier, chaque camp avait ses certitudes. Le monde se partageait entre nations impérialistes et peuples colonisés, entre dictatures et démocratie. La société se divisait en classes, les capitalistes, les riches, et les travailleurs, les exploités. Vous vous rappelez ?

Nous avons connu ces certitudes et pourtant elles étaient déjà largement ébranlées et les lignes de fracture n’étaient peut-être pas aussi nettes que dans nos nostalgies. Les alliances contre les dictatures fascistes rassemblaient des coalitions inédites. Les sorties de crise se répartissaient entre dictatures fascistes, révolutions communistes, et des mises en place d’une protection sociale, le New Deal, l’État providence, la sécurité sociale, sous des formes diverses, condamnées par les mouvements révolutionnaires mais plébiscitées par les peuples.

Ces réformes se sont menées dans le contexte d’une suprématie sans partage du monde occidental, suprématie économique, culturelle. Suprématie qui s’est concrétisée par l’écroulement des modèles alternatifs.

Aujourd’hui, les politiques opposent des réformes négociées, des répartitions solidaires, contre les égoïsmes de repli, les fuites derrière des murailles. Parmi eux, bien sûr, les riches, les privilégies, qui ont peur de l’avenir et investissent dans la protection plutôt que dans l’invention. Dans l’évitement plutôt que dans l’accueil.

Parmi ceux qui défendent leurs privilèges on trouve prioritairement les propriétaires de capitaux et de patrimoine héréditaire. Mais aussi une multitude de groupes de protection qui fonctionnent comme des sociétés mutualistes. Des clubs fermés.

Le PS est en principe un instrument d’émancipation, d’intervention politique. Il est d’abord un groupe de protection des élus qui se battent pour préserver leurs privilèges. Les réactions devant l’interdiction de cumuls sont de même nature, très exactement, que les réactions des nantis devant tout ce qui porte atteinte à leurs privilèges : vous allez nous affaiblir dans un monde concurrentiel, vous allez porter atteinte à notre efficacité, etc…

Le PS lutte pour une société plus juste avec des élus et des cadres issus  d’un système profondément inégalitaire. Ne comptons pas sur nos dirigeants pour qu’ils balaient devant leur porte parce qu’ils n’ont jamais tenu un balai.


C’est pourquoi la question de l’interdiction du cumul des mandats est une urgence politique. Il s’agit de mettre en adéquation le parti socialiste et ses objectifs. L’interdiction du cumul c’est comme le premier pas sur la lune. Un tout petit pas pour un homme mais un énorme pas pour un parti. 

mercredi 24 septembre 2014

la grande peur

La Grande Peur

Les démocraties et les États de droit sont menacés en permanence par tous ceux qui ne respectent pas la démocratie et le droit. Le banditisme, la corruption, les passe-droits, le clientélisme, les comportements délictueux, l’exclusion, le racisme, la violence.

Et puis il y a le terrorisme. Le terrorisme est un mouvement politique qui utilise la terreur pour des objectifs politiques.

Le terrorisme est un danger politique majeur quand il bénéficie d’un soutien logistique, financier, politique. Les terrorismes corses, basques et irlandais représentaient un vrai danger car ils bénéficiaient  de tels soutiens de la part d’une partie de la population « civile ». Des partis politiques légitimaient leur action, manifestaient pour la libération des terroristes emprisonnés, se présentaient aux élections et obtenaient un pourcentage non négligeable des votes lors d’élections démocratiques.

Quand le terrorisme n’obtient pas ce soutien politique ou intellectuel, il n’est pas un problème politique, il est un problème de police. Il faut dénoncer, isoler les criminels, les arrêter, les juger, les condamner.

Le terrorisme qui se réclame du Jihad est-il en ce sens un problème politique ? Où sont les indices d’un soutien politique et financier ou culturel de la part d’une partie même infime de la population française, ou américaine, ou britannique ? Où sont les partis politiques, les réunions de soutien, les manifestations où ce terrorisme est glorifié, admiré, soutenu ? Y a-t-il en France une seule main qui tremble pour prendre le téléphone et dénoncer à la police un individu qui s’apprête à commettre l’irréparable ?

         Se pose alors la question pourquoi ces manchettes, ces reportages, ces enquêtes, ce déchaînement médiatique, comme si un territoire étranger contrôlée par quelques milliers de fous de Dieu pouvaient mettre à feu et à sang nos sociétés. Pourquoi font-ils si peur ?

          Il ne s’agit pas de sous-estimer le danger, mais au contraire de mieux le combattre. La peur est un sentiment qui ne se raisonne pas. Mais si nous avons peur de ce terrorisme-là, il a pour une part gagné la bataille en nous pourrissant le quotidien, en envahissant nos écrans, en parasitant les conversations, en élargissant par la peur irraisonnée le nombre des suspects.


La peur lié à l’usage et à la consommation de drogues interdites a jusqu’ici empêché un combat efficace contre les mafias et les dégâts sanitaires. C’est l’absence de peur qui a permis des mesures de prévention et de soin. Si la peur du terrorisme islamique pervertit nos réactions au point de glisser vers des folies sécuritaires, nous n’aurons rien gagné en efficacité contre ces criminels, mais nous aurons perdu en cédant du terrain à la menace. Si ce terrorisme est un problème de police, il faut donner à la police les moyens de le combattre efficacement. Les criminalités cherchent des richesses et des privilèges, elles ne cherchent pas à terroriser. La terreur est au contraire l’arme principale de ces dangereux soldats de Dieu. Avec des moyens d’une simplicité barbare, ils cherchent à obtenir un seul résultat : le tremblement stupéfait des sociétés occidentales. Pourquoi leur faire ce cadeau ?