mardi 22 février 2011

révolution?

métro château rouge, des militants du NPA distribuent un texte de soutien à la révolution dans les pays arabes, en invitant la France à suivre l'exemple en se révoltant. Je remarque à un distributeur que ce que demandent les "révolutionnaires" des pays arabes, c'est un régime parlementaire, les libertés individuelles et publiques, une économie de marché libre, non contrôlée par des mafias, la réduction du chômage de 4O% à 10%. En résumé, ils réclament pour eux le système que le NPA veut renverser.

dimanche 20 février 2011

une journée ordinaire

Une journée ordinaire. Dimanche 20 février. Madame B…devait rentrer à Biarritz le lundi 21. Pour des raisons sans intérêt, elle rentre plus tôt. Monsieur M…, serviable, s'offre à changer le billet. Sur la toile, c'est impossible, il faut une borne ou un guichet. Monsieur M…, toujours serviable, prend le ticket, le métro jusqu'à la Gare du Nord, repère une borne, passe un doigt ferme sur les étiquettes de l'écran, obtient le changement, paie le supplément requis, le code est bon, nous allons vous émettre un ticket, puis une annonce dit: incident technique, nous ne sommes pas en mesure d'imprimer votre ticket. Nous allons imprimer un ticket d'incident technique. L'écran se noircit. Pas de billet, pas de ticket d'incident technique. Il ne reste à monsieur M… que ses yeux pour pleurer. Il monte à l'étage où sont les guichets. Heureusement, la file d'attente est petite. Il explique son cas à la guichetière. Qui lui demande le numéro de la borne. Mais qui pense à repérer, puis à retenir le numéro de la borne? Il ne sait pas. Il me faut le numéro de la borne pour appeler l'équipe technique qui va régler cet incident. Je me prépare à redescendre à l'étage inférieur pour noter le numéro de la borne quand une employée d'aide à la clientèle perçoit mon émoi et me propose son amabilité. Elle téléphone à l'équipe technique, lui donne rendez-vous dans le hall des bornes, cinq minutes plus tard, un homme seul et son grand sac à outils la reconnaît, je lui indique la borne défectueuse, il introduit une clé spéciale, dégage mon billet, l'employée d'aide à qui je dis qu'elle vaut plus que trente-quatre centimes par minute me raccompagne au guichet, me conduit directement à un guichet libre et grâce à dix-huit euros supplémentaires, Madame B… qui avait un billet de première classe gagne le droit de voyager en seconde. En quittant la gare du Nord, j'introduis mon billet dans la fente, je le reprends pour que les portillons s'ouvrent, mais un naufragé, un SDF dépenaillé fonce dans l'ouverture, me bouscule et pendant ce temps les portillons se referment et il me faut introduire un nouveau billet. Je peste. Dans le couloir, un employé de la sécurité poursuit une petite fille bronzée qui s'enfuit en jetant en l'air une pochette vide. Tout le reste a bien fonctionné dans le calme et la bonne humeur.

lundi 14 février 2011

voyage à Amsterdam sur les salles de consommation

A l'aller, guidé par un GPS, ralenti à Anvers par des embouteillages monstres, nous arrivons à Amsterdam vers neuf heures du soir. Laborieuse distribution des chambres. Une chambre accessible par l'ascenseur ne comporte pas de toilettes. Me voyez-vous aller pisser dans le couloir comme dans ma première année d'étudiants, pourquoi pas des feuillées au fond du jardin comme quand j'étais enfant pendant la guerre, à quoi bon soutenir une thèse d'état s'il faut enfiler un pantalon à quatre heures du matin, donc je descends immédiatement à l'accueil et le concierge asiatique me donne une autre chambre. Celle-ci est au quatrième étage, l'ascenseur s'arrête au troisième, et pour l'atteindre, un escalier raide comme la face nord de l'Aiguille du Diable. J'hésite. Marguerite voit mon hésitation, me propose de permuter, je dis d'abord non, on a sa fierté, puis d'accord, je vais chercher mes affaires que j'avais laissé dans ma première chambre, la 234, celle qui n'avait pas de toilettes, juste une douche. J'ai dans la main deux clés, la 234 et la 405, Marguerite va chercher ses affaires dans la 302 et les met dans la 405, pendant que moi je pose mes affaires dans la 302, nous échangeons nos clés. A Amsterdam, les escaliers sont tous très raides, les maisons sont construites en altitude et les personnes âgées atteintes de sciatique souffrent. A Amsterdam, question accueil, il vaut mieux être consommateur d'héroïne que personne âgée en difficulté d'ascension alpine. Je le dis sans amertume, mais avec l'arrogance de la vérité: nous avons grimpé des marches d'une raideur toute hollandaise, descendu des escaliers qui étaient plus des échelles de meunier que des instruments de déplacement pour alpinistes retraités, Avec le succès que l'on connaît des la réduction des risques, la courbe des âges des usagers grimpe aussi fort que les marches amstellodamoises, et les salles de consommation que nous avons visitées ne pourront certes pas être transformées en maisons de retraite pour consommateurs de drogues. Je sais bien que chacun voit midi devant sa porte, mais l'objectif du voyage n'était pas l'accessibilité des salles de consommation aux personnes âges ou en difficulté de déplacement, mais bien les salles de consommation. Nous dînons dans un restaurant indien en rez-de-chaussée.

dsk obama

Il est "étranger aux difficultés quotidiennes des familles américaines. C'est la plus grande célébrité du monde, mais-il prêt à prendre les commandes? Il n'incarne pas l'image de l'Amérique, l'image de l'Amérique de l'Ouest, des terroirs et des territoires, celle qu'on aime bien, celle à laquelle je suis attaché, celle qui ne ment pas et qui demeure votre recours.

La citation ci-dessus est-elle

Du porte parole du directeur de campagne de McCain contre le candidat Barak Obama ?

De Christian Jacob, président du groupe UMP à l'assemblée nationale contre DSK?

De Philippe Pétain en Juin 1940?

lundi 7 février 2011

humor

Humor ist wenn man trotzdem lacht

Mon père m'a légué cette citation. L'humour, c'est quand on rit malgré tout. Par exemple, quand on a mal aux jambes, mal aux dents, mal aux yeux, mal à la tête, mal à la poitrine, mal au tru, mal en drain, quand la testostérone chute, quand la fatigue ralentit, quand le souffle court, quand la cheville ouvrière, quand l'huile se coude, quand la main chaude, quand l'oreille bave, quand la semelle glisse, quand l'œil se couvre, quand le cheveu tombe, mais les vêtements doivent rester propres. Quand l'informaticien meurt d'une crise cardiaque au moment où la connexion wifi donne des signes de faiblesse, quand la patte d'oie. Malgré tout ça, on rit. Trotztdem.

Attention. La distance entre dire qu'on rit, entre écrire qu'on rit, et le rire, cette distance là est énorme. Ce n'est parce qu'on l'écrit ou qu'on le dit qu'on le fait. Le rire n'est pas un exercice, comme la marche ou le vélo. Le rire est une explosion involontaire, un concert improvisé, une chute brutale. Ce n'est pas comme être un imbécile, car nous savons depuis la cour de récréation de la maternelle que c'est c'ti qu'y dit qu'y est. Le dire, c'est l'être. Pas le rire. Le rire n'est pas un concept qu'on peut mettre en action, un programme qu'on peut réaliser en étant porté au pouvoir par une alliance majoritaire, le rire ne peut pas être mis en programme.

L'origine de cette citation est une carte postale venue de Suisse ou mon père était interné militaire, sans doute dans la Suisse allemande et l'image de la carte postale était celle d'un bonhomme pris dans une averse et une tempête, il est trempé, il a froid, son parapluie est cassé et ne le protège plus et la légende de l'image est "humor ist wenn man trotzdem lacht". Je n'ai plus aucune idée de ce que mon père avait écrit sur la partie de la carte réservée à l'écriture. Ça devait être quelque chose dans le genre, je pense beaucoup à vous, je vous embrasse, j'espère vous revoir bientôt, ou bien, j'espère que tu travailles bien à l'école, enfin, moi personnellement, si j'étais interné militaire en Suisse allemande, c'est ce que j'écrirai à mes enfants s'ils étaient d'âge scolaire, mais je ne suis pas mon père.

Chaque fois que ma mère recevait une carte postale de Suisse où mon père était interné militaire, elle la lisait en pleurant. J'imagine et je suis certain qu'en recevant cette carte particulière (un homme pris dans la tempête, son parapluie retourné, son chapeau qui s'envole, son imperméable arraché), elle s'est mise à pleurer. Ma mère ne comprenait pas l'allemand.

dimanche 6 février 2011

rap GO

Rap go

La rencontre avec Guillaume Huet, coresponsable local de la politique de la ville, le jeudi 3 février 2011 a permis d’échanger des informations et des réflexions.

L’évolution sociale du quartier. La Goutte d'Or n’est pas un ghetto fermé, mais à l’intérieur de ce non-ghetto peuvent se constituer des ghettos, des groupes fermés, ayant peu de contacts avec l’extérieur, privilégiant les relations endogamiques : endogamie sociale, culturelle, religieuse ou ethnique. Les évolutions sont contradictoires. Les écarts se creusent alors même que la mixité sociale se réalise. Le fossé se creuse entre la misère et la précarité de ceux qui se sentent coincés et les privilèges apparents ou réels d’une bourgeoisie qui s’installe dans le quartier pour rester. Les plus pauvres, lorsqu’ils deviennent moins pauvres, quittent le quartier. Reste un face à face entre une extrême misère et précarité et une vie de cocagne. D’après la police, les vols avec violence sont plus nombreux, à cause de ce face à face. Plus de téléphones sophistiqués, plus de difficultés à joindre les deux bouts, on approche une allumette et ça explose.

La Goutte d'Or n’est pas un ghetto fermé, ni socialement, ni géographiquement. Socialement mixte. Y compris pour les Descendants d’immigration récente (les DIR), qui font commerce. Les primo-arrivants (PAR) trouvent ici des relais de solidarité et des modes de vie ou de survie légaux ou illégaux, vente à la sauvette, prostitution. Les consommateurs de drogue trouvent des produits ou des lieux où ils peuvent consommer en groupe. Les Descendants d’immigration lointaine (DIL), intégrés socialement par un métier et culturellement par une scolarité nationale, y trouvent des logements relativement moins chers qui leur permettent de vivre en plein Paris dans des conditions de confort acceptables ou plus. Les cinémas, les théâtres, les activités de loisirs, sont tout près : soit à l’intérieur de la Goutte d'Or, bibliothèque, centre Barbara, LMP, Olympic Café, Echo musée, soit à la frontière : théâtre des Bouffes du Nord, de l’Atelier, des Abesses et un peu plus loin, les cinémas de la place Clichy, des quais de Loire ou de Seine, du Quartier Latin.

Les DIL, en achetant ou en louant dans le quartier, savent d’avance ce qu’ils vont y trouver. Avant d’acheter ou de louer, on vient faire un tour et on voit des marchands ethniques, les commerçants à la sauvette, les usagers de drogue, les prostituées. C’est très différent de concevoir le commerce légal ou illégal, la drogue et la prostitution et ce côtoyer des marchands, des commerçants, des usagers, des prostituées. Une fois installés, les DIL présentent des exigences qui sont mesure leur intégration dans le quartier. Les enfants qui n’ont pas choisi de vivre ici, mais qui accompagnent leurs parents, remarquent vite que les rues sont plus sales que dans d’autres quartiers de Paris et que sont tolérées ici des pratiques qui sont interdites ailleurs. Ils le disent tout haut : les rues sont sales dans mon quartier. Pourquoi ? Ils disent, pourquoi les couloirs du métro sont encombrés de vendeurs qui gênent le passage ? Ici et pas au métro Odéon ? Les intégrés français ou étrangers ne voient plus la quittance de loyer ou l’acte de vente, ils voient l’envahissement des trottoirs par des étals de carton que chasse de temps en temps une patrouille de police, les acheteurs et les fumeurs de produits interdits, la prostitution. Après avoir accepté de louer ou d’acheter dans un quartier particulier, ils veulent vivre dans un quartier moins particulier. Ce qui est parfaitement légitime. Après avoir conquis des territoires sauvages, les conquérants de l’Ouest américain ont voulu détruire les maisons de passe, construire des écoles, des églises et des prisons.

Tant que les habitants vivent seuls ou en couples sans enfant, les choses ne se passent pas trop mal. Leurs amis habitent ailleurs admirent l’exotisme du quartier ou s’étonnent du courage qu’il faut pour vivre dans l’insalubrité et l’insécurité. Les habitants sortent et rentrent par des itinéraires qui évitent les zones considérés par eux comme les plus glauques ; Ils assistent aux réunions publiques des conseils de quartier où ils se plaignent des nuisances. Ils réclament des solutions d’urgence, et acceptent mal les réponses des politiques ou des administratifs qui leur disent qu’il n’y a rien à faire, ou bien qu’on fait beaucoup, mais pas pour eux. La quantité d’actions pour l’aide à l’insertion des jeunes, pour l’aide sociale, l’aide scolaire, est impressionnante. Mais elle reste invisible, notamment à la moyenne bourgeoisie urbaine dont le nombre grandit dans le quartier. Ce qui est visible, ce sont les constructions nouvelles, la médiathèque, le centre Barbara. Inconvénient réel : les habitants sont un peu fatigués du bruit des marteaux-piqueurs.

Tout est en place pour le pire. La colère monte contre les difficultés à se déplacer, le non-respect des règles et des lois, ce commerce à la sauvette qui est à la fois un mode de survie et une nuisance extrême. L’évolution des écoles n’est pas bonne. Tout est en place pour le pire, mais le pire n’arrive pas. Ou encore, on peut trouver que le pire, c’est ce qui existe.

Il n’y a pas de solutions rapides. Il y a de lents glissements de terrain. La prostitution se cachait dans des immeubles squattés insalubres. Ils sont graduellement détruits et la prostitution devient plus visible. Si demain s’ouvre, pas trop loin, une salle de consommation de drogue, on verra moins les consommateurs dans la rue. L’ouverture d’un marché du monde du côté de la Porte de Clignancourt et en projet. Dans combien d’années ? Mais pourquoi dans notre quartier, toujours ici et pas ailleurs ? Parce qu’ailleurs, les loyers sont très élevés, les habitants manifestent et se révoltent quand on veut construire des logements sociaux ou ouvrir des centres d’accueil pour personnes en difficultés, parce qu’ailleurs les habitants trouvent la solution dans un enfermement qui brise la société. La politique consiste pour eux à construire des barrières et installer des gardes. La Goutte d'Or n’échappe pas complètement à ce repli et certains endroits sont des ilots pas trop mal protégés. Mais la pression est trop forte et l’enfermement ne peut pas être une politique. Nous sommes aux premières lignes du front. Pour mener quelle bataille ? Une bataille qui consiste à dire qu’il est de l’intérêt de tous, donc aussi des moins démunis, de maintenir à flot la partie de la population qui se noie. Et qu’il est de l’intérêt des plus démunis, notamment, mais pas seulement, de vivre dans des sociétés et dans des quartiers où une classe moyenne éduquée, salariée, entreprenante, accepte de partager l’espace. L’égoïsme du repli c’est la guerre civile. La recherche constante de compromis sociaux, culturels, c’est la politique au sens le plus noble. Qu’est-ce qui est le plus facile ?



Compte-rendu rédigé par Maurice Goldring. Lundi 7 février 2011

mercredi 2 février 2011

définition

Les bien intentionnés ont du mal parfois avec le vocabulaire. Français de souche versus immigrés? ça ne marche pas. Je propose les termes suivants:

Les primo-arrivants (PAR)
Les descendants d'immigration récente (DIR)
Les descendants d'immigration lointaine (DIL)

Mes parents étaient des PAR, je suis un DIR et mes enfants sont des DIL. Comme ça tout le monde trouve sa petite boîte.

mardi 1 février 2011

migration

Majid Ba a émigré du Sénégal vers la France, il a tiré un livre de son expérience, La Sardine du Cannibal, aux éditions Arcane. Une soirée de lancement dans le quartier, les discours. Les paroles retiennent du livre la misère, l'exploitation la faim, les démarches épuisantes pour des papiers. Aujourd'hui Majid a trouvé du travail, des papiers, une compagne. Il milite au PS qui lui apporté solidarité, reconnaissance. Il est vice-président du conseil de quartier. La deuxième moitié du livre, celle qui parle de promotion, de réussite, n'intéresse pas les orateurs de France. Pour un orateur de France, qui est de gauche, qui est contre Sarkozy, contre Hortefeux, contre la police qui vient chercher les enfants à l'école, un émigré ne peut être que pauvre, affamé, en cavale, sans papier, sans domicile. On ne comprend plus pourquoi les hommes et les femmes migrent. Les raisons de migration sont toujours doubles: des raisons de partir, et des raisons d'arriver. Si le lieu d'arrivée est aussi terrible que le lieu de départ, pourquoi partir? La migration est à la fois une épreuve et une chance. De trouver un travail mieux payé, une chance pour les femmes notamment de libération, pour les enfants d'une scolarisation et d'un avenir. Tout ça est dans le livre de Majid. Mais un orateur de France se sentira moins de gauche s'il parle de la deuxième partie. J'ai assisté à des meetings pour les sans-papiers où des orateurs expliquaient que la lutte, avec l'appui de syndicats et des élus, leur avaient permis d'obtenir des papiers. Ils se sont faits siffler. Ce sont des traîtres. Un vrai immigré n'a pas de papier, pas de travail, pas de logement. S'il a tout ça, comment voulez-vous faire la révolution?